Dans moins d’un mois, les parents dévoués qui sont appelés à s’occuper d’enfants de façon bénévole le plus souvent, seront fichés par l’Independent Safeguarding Authority (ISA), une agence gouvernementale. L’ISA procédera à une enquête sur leurs antécédents et jugera s’ils ne représentent pas un danger. A compter du 12 octobre, tous ceux qui sont amenés à s’occuper « de manière fréquente (au moins une fois par mois) ou intensive (trois fois par mois) » d’enfants en Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord devront s’inscrire auprès de l’ISA. Laquelle vérifiera qu’ils n’ont pas, dans une vie précédente, été suspectés de pédophilie ou de violence. Auquel cas ils devront se retirer.
Les enseignants, les infirmières, les médecins, les assistantes maternelles, les proviseurs ou encore les dentistes sont concernés au premier chef. Mais la loi de 2006, qui a créé ce dispositif, va bien au-delà. Un adulte qui accompagne régulièrement des sorties de scouts, ou de jeunes sportifs par exemple, devra lui aussi être accrédité. Tout comme les familles qui accueillent des enfants étrangers désireux de perfectionner leur anglais. Ceux qui oublieront de s’inscrire auprès de l’ISA encourent une amende de 5 000 livres. Tout comme leurs employeurs, qui seront passibles d’une peine de prison s’ils font travailler une personne que l’ISA a jugée inapte. « La base de données anti-pédophiles », comme l’appelle le DailyTelegraph, qui mène une violente campagne contre son entrée en vigueur, devrait ficher 11,3 millions de personnes, soit un adulte sur quatre. Jusqu’ici, le gouvernement recensait exclusivement les professionnels de l’enfance, mais pas de manière exhaustive et avec une enquête à leur sujet plus limitée . Il a ainsi déjà collecté plus de 5 millions de noms.
Lors de son adoption à Westminster en 2006, la loi était apparue consensuelle. Les rares débats qu’elle avait suscités concernaient les 64 livres que doivent verser les fichés de l’ISA au titre des frais d’enquête qu’ils occasionnent. Il a été décidé que les bénévoles en seraient exonérés. Pour le reste, il n’y avait pas eu de polémique. Il a fallu attendre que l’ISA précise, il y a quelques jours, les modalités de sa mission pour que les critiques se fassent entendre. Tollé général dans le pays Dans le même ordre d’idées, la National Society for the Prevention of Children a jugé que cette législation mettait en péril « des activités parfaitement saines et normales ». « Quand un dispositif destiné à protéger les enfants est critiqué de toutes parts, c’est qu’il va trop loin », ont fait remarquer plusieurs personnalités politiques. Ed Balls, le ministre de l’éducation, a dû annoncer, lundi 14 septembre, qu’il allait faire réexaminer l’ensemble du dispositif pour vérifier que le gouvernement « a bien placé le curseur là où il faut ». Sir Roger Singleton, le président de l’ISA, a jusqu’à décembre pour juger si des « ajustements » doivent être envisagés. M. Balls a jugé utile de préciser que « les adultes qui rendent occasionnellement service à des amis en allant, par exemple, chercher leurs enfants à l’école, ne seraient pas concernés. Pas plus que les parents qui se rendent à l’école de leurs enfants pour le spectacle de Noël, ou autre ».
La loi de 2006 qui a créé l’ISA et sa base de données trouve ses origines dans un fait divers qui a ému la Grande-Bretagne et l’Europe entière en 2002. Holly Walls et Jessica Chapman, deux petites filles de 10 ans, avaient été tuées à Soham (Cambridgeshire) par Ian Huntley. Cet homme travaillait dans le collège voisin, bien qu’il ait été impliqué dans des affaires d’agression sexuelle et de viols. Mais il n’avait pas été condamné dans ces dossiers