Après plus de sept ans de détention sur la base américaine de Guantanamo à Cuba, l’Algérien Saber Lahmar est arrivé mardi matin en France, selon le ministère des Affaires étrangères. Agé de 40 ans, le ressortissant blanchi de toute accusation de terrorisme compte « refaire sa vie en France », a souligné son avocat américain Robert Kirsch. D’après un responsable américain qui a requis l’anonymat, trois autres hommes incarcérés à Guantanamo ont été transférés en Italie et en Hongrie.
Saber Lahmar est le deuxième détenu algérien de Guantanamo accueilli sur le sol français, après Lakhdar Boumediene, 43 ans, arrivé en mai dernier après sept ans d’incarcération à Cuba. (CF. Nea Say…) Dans un communiqué, Me Robert Kirsch a précisé que Saber Lahmar était arrivé dans la matinée à Bordeaux. « Nous sommes reconnaissants au gouvernement français » de son « courage et de sa générosité », a-t-il dit. Le ressortissant algérien « a été reconnu innocent de toute charge relative à la participation à d’éventuelles entreprises terroristes par des décisions de justice de plusieurs pays, dont celle des Etats-Unis qui a ordonné sa libération », a souligné le Quai d’Orsay dans un communiqué. « Son cas a été examiné par les autorités américaines et françaises à la lumière de ses implications juridiques et de sécurité ».
« En décidant d’accueillir sur son sol un second ex-détenu, la France contribue ainsi, comme d’autres Etats européens et non européens, à la mise en oeuvre de la décision » prise par le président américain Barack Obama, « au lendemain de son investiture, de procéder à la fermeture du centre de détention de Guantanamo », a-t-il ajouté.
Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Bernard Valero a déclaré à la mi-journée sans plus de précisions que le ressortissant algérien, arrivé dans la matinée à Bordeaux, passait des « examens médicaux dans un centre hospitalier ». « Nous allons veiller dans les prochains jours à ce qu’il puisse réellement réapprendre à vivre normalement », « nous allons le soutenir en liaison avec les associations », a-t-il ajouté lors d’un point-presse, indiquant que Saber Lahmar, marié à une Bosniaque et père de deux enfants, n’avait « pas de famille en France » mais avait « émis le souhait de venir » dans ce pays. A la question de savoir si la France allait accueillir d’autres détenus de Guantanamo, Bernard Valero a répondu: « aujourd’hui, à ce stade, ce n’est pas prévu ». Saber Lahmar avait été arrêté avec Lakhdar Boumediene en 2001 en Bosnie, où ils étaient soupçonnés avec quatre autres Algériens de préparer un attentat à la bombe contre l’ambassade des Etats-Unis à Sarajevo. Le groupe est arrivé à Guantanamo en janvier 2002, et cinq des ressortissants, dont Lahmar et Boumediene, ont été blanchis de tout soupçon de terrorisme.
Outre Saber Lahmar, deux Tunisiens incarcérés à Guantanamo sont arrivés lundi soir en Italie, et ont été aussitôt placés en détention. Adel Ben Mabrouk, 39 ans, et Mohamed Ben Riadh Nasri, 43 ans, qui seront jugés pour des chefs d’inculpation relatifs au terrorisme, étaient liés à un centre islamique à Milan décrit par les Etats-Unis comme la principale planque d’Al-Qaïda en Europe avant les attentats du 11 septembre 2001, selon des responsables. Nasri a été entendu peu après minuit par des représentants de la justice et Mabrouk sera interrogé dans les prochains jours. Tous deux sont soupçonnés d’appartenir à un groupe lié à Al-Qaïda, et d’avoir recruté des hommes pour combattre en Afghanistan. Le chef de la diplomatie Franco Frattini a expliqué mardi que les Etats-Unis avaient demandé à l’Italie d’accueillir d’autres détenus et fourni une liste de noms qu’étudiait Rome.
Un quatrième détenu de Guantanamo, dont l’identité n’a pas été communiquée, a été transféré en Hongrie. Selon le « Washington Post », il s’agirait d’un Palestinien.
En septembre, deux Ouzbeks incarcérés sur la base américaine à Cuba avaient été envoyés en Irlande, et récemment, deux Syriens qui y étaient également détenus sont arrivés au Portugal. Ils ont été remis en liberté. Le président Obama a confirmé en octobre que la fermeture de la prison de Guantanamo n’interviendrait pas en janvier comme il l’avait annoncé, partiellement en raison de son incapacité à convaincre d’autres pays d’accueillir les détenus. Rappelons que D’après l’administration américaine, environ 90 des quelque 210 détenus de Guantanamo sont libérables ou pourraient faire l’objet d’un rapatriement.