Sur les 198 détenus qui restent aujourd’hui à Guantanamo, 92 sont de nationalités Yéménites, et, à leur tour, la moitié de ceux-ci ont été innocentés par la commission d’enquête chargée de définir le statut des prisonniers. Or cédant à la pression des républicains Obama a décidé de suspendre le rapatriement des Yéménites tant que les Etats-Unis n’auront pas toutes les garanties qu’ils n’iront pas rejoindre al-Qaïda ou d’autres mouvements terroristes. De fait malgré leur innocence qui a été démontrée et reconnue officiellement, ces détenus pourraient ainsi rester encore longtemps dans des sortes de « limbes juridiques » où sont tous ceux qui ne trouvent pas de pays prêt à les accueillir. Ils pourraient également se voir transférés dans la prison de haute sécurité récemment identifiée de Thomson dans l’Illinois (Etat de Obama) que l’administration espère aménager d’ici quelques mois (Cf. Nea say) A moins qu’en raison des récents évènements, l’administration américaine en vienne à interrompre pour de bon ses démarches visant à fermer Guantanamo. C’est pourquoi la réaffirmation par le président de son intention de fermer est importante.
Mais a contrario, le président américain a déjà annoncé que les autres, jugés trop dangereux pour être relâchés mais contre lesquels il n’existe pas suffisamment d’éléments à charge, seraient maintenus indéfiniment en détention. Mais Washington ne se satisfaisait pas des garanties apportées par Sanaa quant à la surveillance des anciens détenus. En privé, l’administration ne s’est jamais caché que la conclusion d’un accord satisfaisant avec le Yémen était le plus grand défi à relever pour parvenir à fermer Guantanamo. Voire qu’en l’absence d’accord, la fermeture pourrait être simplement compromise. Depuis huit ans, 9 Yéménites seulement avaient été renvoyés de Guantanamo vers leur pays. « L’arrêt des rapatriements de Yéménites va ralentir le délai dans lequel Guantanamo va être fermé et pourrait avoir des conséquences sur la manière dont le camp va fermer », estime Matthew Waxman, ancien haut responsable au Pentagone aujourd’hui expert au Center of foreign relations (CFR). « L’administration est réticente à faire venir des détenus sur le sol américain pour les détenir indéfiniment sans procès mais pour beaucoup de Yéménites, elle n’a plus guère d’autre choix », explique-t-il à l’AFP. Des hommes vont rester en prison, « pas à cause de ce qu’ils ont fait mais par peur de qui ils pourraient rencontrer dans les rues du Yémen », commente Dalhia Lithwick dans le magazine en ligne Slate. « Des prisonniers peuvent rester indéfiniment enfermés non pas parce qu’ils ont connu un terroriste mais parce qu’ils pourraient en rencontrer un, un jour ». De fait, pour Sarah Mendelson, experte au Center for strategic and international studies (CSIS) interrogée par l’AFP, trouver une solution au problème yéménite de Guantanamo « serait un moyen très concret d’éviter la détention illimitée ». Si physiquement la prison de Guantanamo est vidée, elle craint que le principe de l’emprisonnement sans procès, qui stigmatisaient la plupart des critiques contre l’administration Bush, ne soit que déplacé sur le sol américain.
« Pour rétablir l’Etat de droit et renouer des liens détruits avec les alliés des Etats-Unis, l’administration doit s’engager à amener le nombre de prisonniers détenus sans charge à zéro », plaide l’organisation de défense des droits de l’homme Human rights ce qui est aussi la position de Amnesty International. Jusqu’ici, l’administration a annoncé qu’elle entendait libérer 104 des 198 détenus restant, dans leur pays ou dans des pays tiers (en Europe où les arrivées se font au compte-goutte ?). Elle prévoit d’en traduire quelques dizaines en justice, tout au plus).