Les immigré clandestins débarqués en Corse un cas illustratif des comportements des autorités publiques en Europe confrontées à des boat people. La France placée sous la surveillance du HCR (Haut Commissariat aux réfugiés des Nations Unies) qui lui a rappelé ses obligations. Finalement, un certain nombre d’entre eux ont été « libérés » par décision de justice.
124 clandestins ont été débarqués clandestinement sur une plage corse, transférés dans un gymnase de Bonifacio, les 124 clandestins ont quitté le lendemain le gymnase de Bonifacio où ils avaient passé la nuit. Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés a appellé Paris à un accès «équitable» à la demande d’asile. Transférés en centre de rétention, les 124 clandestins disposent de peu de temps pour constituer leur dossier. Le transfert en centre de rétention administrative des 124 migrants , débarqués par des passeurs sur la plage corse de Paragano, indigne et inquiète les associations. Dernière réaction en date et non des moindres, le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a demandé à la France de garantir l’accès de ces réfugiés aux procédures du droit d’asile. «Les autorités françaises doivent s’assurer que toutes les personnes bénéficient d’un examen complet et équitable de leur demande assorti de la possibilité de présenter un recours suspensif en cas de décision négative», rappelle le HCR. C’est finalement ce qui arrivera et un bon nombre d’entre eux seront « libérés », pour les autres les procédures seront respectées, semble-t-il.
Il convient de rappeler que lorsqu’un clandestin est placé en centre de rétention administrative (CRA), il fait l’objet d’un avis de reconduite à la frontière qu’il a 48 heures pour contester. Il peut déposer une demande d’asile dans les cinq jours à laquelle l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) doit répondre en 96 heures. Si l’avis est négatif, il n’y a pas de recours suspensif. «Le délai est court d’autant que la période de rétention a commencé en Corse et non dans le CRA», relève le porte-parole du HCR. Dès dimanche, des requêtes en annulation des arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière seront examinés par les juges de la liberté et de la détention (JLD). A Lyon, certains recours doivent être abordés lundi, tandis qu’à Marseille ils le seront dimanche. La ligue de défense des droits de l’homme (LDH), la Cimade et RESF (Réseau éducation sans frontières), qui dénoncent «une crispation grandissante de ce gouvernement à l’égard de tout ce qui est étranger» organisent un rassemblement dans la salle d’audience marseillaise.
Vingt-quatre heures après leur arrivée à Paragano, les 57 hommes, 29 femmes et 38 enfants ont été répartis dans cinq différents centres de rétention de métropole, faute d’une capacité suffisante en Corse. Soixante-trois personnes ont été emmenées au CRA de Nîmes, vingt au Canet à Marseille, dix à Lyon, onze à Rennes et dix-neuf à Toulouse. A Toulouse une femme enceinte, prise de contractions, a été hospitalisée avant de rejoindre le CRA dimanche, l’accouchement n’ayant pas eu lieu.
La rapidité de ce transfert a suscité la colère des associations comme cela était prévisible. Avec la notification «en grande précipitation» d’un arrêté de reconduite à la frontière et leur placement en CRA, «on voit mal dans de telles circonstances comment leur situation a été examinée individuellement comme l’avait annoncé le ministre de l’immigration Eric Besson», juge Amnesty International, qui exige la procédure normale. «Le droit est bafoué, il y a détournement de la loi», estime la Cimade. «Dans l’ordre des choses, d’abord on traite les dossiers de demande d’asile et après éventuellement, on place en CRA. Là, c’est l’inverse qui a été choisi». Pour SOS Soutien aux sans-papiers, «on n’a pas le droit de les placer en CRA, car ce sont des réfugiés et ils ne sont donc pas expulsables». Enfin Pierre Henry, directeur général de France Terre d’asile, relève que «le choix de transférer (les migrants) vers des lieux privatifs de liberté complique la tâche des défenseurs des droits», qui ont «peu de temps pour déposer les recours». Sans papiers, leur nationalité n’a pas pu être établie avec certitude mais ces réfugiés, qui sont dans un état de santé satisfaisant, se présentent dans leur majorité comme des Kurdes venant de Syrie. Les autres affirment venir du Maghreb. Les migrants seraient partis de Syrie en camion avant d’arriver en Tunisie où ils auraient embarqué sur un cargo russe. Ce navire les a probablement débarqués à l’aide de petites embarcations, précise le préfet. Les clandestins n’avaient, selon le procureur, pas la France comme destination. Ils espéraient se rendre en Suède ou en Norvège pour y trouver du travail. Ils auraient versé à leurs passeurs de 2.500 à 10.000 euros pour ce périple à travers la Méditerranée. Toutefois les circonstances et la date de leur arrivée demeurent floues.
Les clandestins de Corse remis en liberté. Un quart des 123 clandestins , débarqués le vendredi ont été remis en liberté dimanche. Les 11 clandestins envoyés à Rennes ainsi que 12 adultes et plusieurs enfants placés à Nîmes ont été remis en liberté tandis que l’examen des cas des personnes envoyées dans les autres villes était en cours d’examen ou devaient être étudiés dés le lendemain, le lundi. « Tous devraient déboucher sur une décision identique », a déclaré un responsable de la Cimade. Il a expliqué que ces décisions avaient été prises par les juges des libertés et de la détention en raison de vices de procédure, comme l’absence de notification des droits aux réfugiés, le fait qu’ils n’aient pas pu exercer leur droit d’asile ou encore la présence d’enfants en centre de rétention, assimilable en droit européen à un traitement inhumain. Pour la Cimade, il s’agit d’un désaveu pour le ministre de l’Immigration Eric Besson, qui a annoncé sur France Inter qu’il avait demandé aux préfets locaux de ne pas faire appel.
Le ministre de l’Immigration a souligné sur la radio France Inter que la situation de ces clandestins était tout à fait particulière. « Nous savions pertinemment que nous étions dans un cas de figure inédit et que les personnes allaient demander le droit d’asile. C’est ce qu’elles ont fait, puisque 61 des 81 adultes ont demandé le droit d’asile », a-t-il déclaré. Mais il reste ferme sur le fond : « Ceux qui n’auront pas obtenu l’asile et qui auront refusé toute proposition d’aide au retour volontaire ont vocation à être reconduits dans leur pays d’origine », peut-on lire dans un communiqué du ministère.
Les observateurs estiment que les autorités françaises ont fait preuve de maladresses dans leur rigueur précipitée, ne voulant pas la France soit confrontée au même afflux de migrants que l’Italie, la Grèce ou Malte, les autorités françaises n’aurait pas dû prendre à leur égard un arrêté de reconduite à la frontière avant même que leur demande d’asile soit examinée. Conduite déjà violemment dénoncée lors de cas similaires en Italie. Eventuellement réfugiés politiques et demandant l’asile à la France, ils ne pouvaient être traités comme s’ils étaient des immigrés clandestins qu’il faudrait raccompagner à la frontière. C’est pourquoi Amnesty International France (AIF) critique quant à elle le fait que l’arrêté de reconduite à la frontière leur ait été adressé « en grande précipitation ». « De nouveau, les mesures sécuritaires l’emportent sur la protection des droits des personnes déracinées », peut-on lire dans un communiqué de l’organisation publié dimanche 24 janvier. »Laisser ces personnes déposer une demande en rétention les contraint à le faire non pas en 21 mais en 5 jours », poursuit AIF, qui ajoute que l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) devra dans ce contexte statuer sur leur situation en seulement 96 heures au lieu de plusieurs mois.
Eric Besson a démenti ces allégations dans son communiqué. »Les personnes qui déposeront une demande d’asile en préfecture verront cette demande instruite par l’OFPRA en procédure normale et non pas en procédure accélérée comme le prétendent certains commentateurs », souligne-t-il. Comme dans d’autres cas, le ministre, placé face à l’émotion suscitée par des décisions hâtives et aussi face aux dispositions de la loi, a fait marche arrière.