Le débat public vient de se terminer. Nous avons laissé les lecteurs de Nea say au moment du lancement du débat, quelles sont les conclusions ? où en sommes-nous ? Fortement perturbé par un groupe d’opposants radical, il n’a pas réussi à faire le tour de cette problématique émergente.
La France est le seul pays à avoir organisé un débat public national sur les nanotechnologies. Il s’est terminé le 23 février à Paris sur un bilan en demi-teinte. Dix-sept réunions ont eu lieu dans les grandes villes mais elles n’ont réuni qu’un peu plus de 3 000 personnes. Le site Internet spécialement dédié au débat a reçu 150 000 visites en quatre mois, c’est peu compte tenu de sa richesse http://debatpublic-nano.org/index.html
Le déroulement de plusieurs réunions a été perturbé par des membres de l’association grenobloise «Pièces et main-d’œuvre» (PMO) qui voyait dans ce débat une «tournée de promotion des nanotechnologies». Du coup, les dernières discussions ont eu lieu à huis clos, sur invitation. Ce groupe se revendique des «luddistes», des artisans du textile qui, au XIXe siècle, en Angleterre, se sont révoltés contre l’apparition des métiers à tisser et ont cherché à détruire les premiers ateliers. «Ils ont voulu empêcher la libre expression du débat public. C’est une atteinte très grave à la démocratie participative», juge de son côté Jean Bergougnoux, président de la commission chargée de l’organisation de ce débat, estimant toutefois que PMO pose des vraies questions.
Les 51 cahiers d’acteurs rédigés à cette occasion révèlent néanmoins que la problématique des nanotechnologies ne laisse pas indifférent un petit nombre de personnes. Elles mobilisent à la fois beaucoup d’espoirs mais aussi beaucoup d’inquiétudes. La commission du débat présentera d’ici à deux mois une synthèse des principaux arguments avancés par les intervenants. Des propositions très différentes sont avancées, par exemple moratoire partiel ou total. Une seule conclusion semble s’imposer : les nanotechnologies marquent une rupture avec le monde visible qui est le nôtre depuis des millénaires. Pour certains chercheurs et industriels, ces propriétés offrent la possibilité de mettre au point de nouveaux traitements contre les maladies ou de nouveaux outils d’imagerie médicale mais aussi d’améliorer les performances des objets de la vie de tous les jours, de produire de nouvelles sources d’énergie ou de fabriquer de nouveaux produits cosmétiques. En associant les nanotechnologies, l’informatique, les sciences cognitives et les biotechnologies, on rêve d’améliorer les performances humaines. À l’inverse, d’autres s’inquiètent de la nouveauté de ces objets et des risques qu’ils peuvent présenter pour la santé ou l’environnement mais aussi pour les libertés comme Alex Tûrk, président de la CNIL. On ne sait rien aujourd’hui de ces risques, alors que la réglementation commence à peine à se mettre en place au niveau national et n’existe pas au niveau européen où le débat est à peine engagé et seul ce niveau est digne d’intérêt et porteur d’avenir. Un débat prématuré ? Non ! mais l’on ne sait pas toujours de quoi on parle exactement.
Lors de la réunion de clôture, l’intervention la plus remarquée fut celle du président de la CNIL, Alex Türk : le cri d’alarme en fut le point fort. L’arrivée des nanotechnologies dans les technologies de l’information ne constitue pas pour lui une avancée, mais la pire des menaces contre les libertés individuelles. Pour lui, « lorsqu’on miniaturise des choses qui existe déjà, il arrive un moment où la différence de niveau peut devenir une différence de nature (…)La possibilité un jour d’être surveillé par le biais de nanopuces indétectables est bien réelle.On va enter dans une société où l’on aura plus le droit à l’incognito. Comment avoir la certitude que je suis seul avec quelqu’un et que personne n’écoute ce que je dis ? » demande Alex Turk. En Allemagne de l’est, les gens avaient toujours un moyen d’échapper à la surveillance de la Stasi, mais avec les nanotechnologies plus personne ne pourra s’y soustraire, estime-t-il. Il craint que tout déplacement ou propos pouvant être contrôlé, chacun ait tendance à s’autoformaté, marquant la fin annoncée de toute intimité. Il a l’intention de demander au parlement s’il y a des moyens d’interdire certaines applications de nanotechnologies dans les systèmes d’information. Une démarche qui rejoint celle de l’association Vivagora http://www.vivagora.org/spip.php?article619
qui réclame une « autorisation de mise en société » pour certaines technologies comme il existe des demandes de mise sur le marché pour des produits nouveaux. Une raison de plus pour dire que ce débat ne peut se placer qu’au niveau européen. La CNIL a présenté le 15 octobre 2009 une fiche pratique sur les nanotechnologies http://www.cnil.fr/la-cnil/actu-cnil/article/article/2/les-nanos-kezako/
« La recherche en action, gros plan sur les réponses apportées par la recherche européenne aux questions et enjeux de société. Un monde minuscule au potentiel immense » Commission européenne disponible en 11 langues. http://www.cnil.fr/la-cnil/actu-cnil/article/article/2/les-nanos-kezako/
Des qu’il y a traitement des données, la CNIL devra en être informée en France et valider ce traitement. Il semble en effet peu probable que ces traitements ne soient pas soumis à la CNIL.
Le CIL aura donc un rôle essentiel à jouer dans ce domaine ou l’éthique doit être le chemin de la sagesse.
Cela va être passionnant