Une question posée avec fougue par Daniel Cohn-Bendit pendant l’heure des question mardi 20 avril a permis au président Barroso d’apporter la preuve que la Commission avait tiré toutes les leçons de l’affaire swift. Il a rappelé que les négociations, commencées il y a quelques années, se font désormais sous le régime du Traité de Lisbonne. Le Parlement sera associé comme il se doit en toute transparence. Il n’y aura pas une réédition de la mésaventure qu’a connue l’accord swift. Pour certains députés, un début de transparence ne légitime pas ACTA.
Comme annoncé, les parties (Australie, Canada, Corée du sud, Etats-Unis, Mexique, Nouvelle-Zélande, Singapour et Suisse) ont rendu public le texte consolidé issu du 8ème round de négociation. « Le document montre que l’objectif global de l’ACTA vise à répondre à des infractions à grande échelle à la propriété intellectuelle ce qui a un impact économique important. En aucun cas ACTA ne va conduire à une limitation des libertés civiles ou au harcèlement des consommateurs » se défend la Commission dans son communiqué. « Je me réjouis que l’UE ai convaincu ses partenaires de rendre public le texte de négociations, qui montre clairement sur quoi porte l’ACTA : cet accord garantira à notre industrie et à nos créateurs une meilleure protection sur les marchés tiers, ce qui est essentiel pour que nos affaires prospèrent. Il n’y aura pas d’impact négatif sur les citoyens européens » a tenu à souligner le commissaire au Commerce, Karel de Gucht. La Commission précise que l’ACTA sera entièrement en conformité avec la législation communautaire actuelle. Cela signifie qu’il est limité à l’application des droits de la propriété intellectuelle. L’accord n’inclut pas des dispositions qui modifient en substance la législation sur la propriété intellectuelle, crèent de nouveaux droits ou changent leur durée. Il établira des règles minimales sur la façon dont les innovateurs et les créateurs pourront faire valoir leurs droits devant les tribunaux, aux frontières et concernant l’Internet. « Le projet de texte prouve que les inquiétudes spécifiques soulevées par la société civile en particulier sont infondées. Aucun des pays parties à l’ACTA ne proposent que les gouvernements introduisent le principe de la riposte graduée pour sanctionner les violations des droits d’auteur ou le piratage sur Internet. De même l’ACTA n’entravera pas l’accès aux médicaments génériques » Texte intégral en langue anglaise http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/10/449&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en
Comme les lecteurs de EULOGOS NEA SAY le savent cette publication est le résultat des pressions considérables exercées par la société civile mais aussi le Parlement européen : les lecteurs de Nea Say se souviennent certainement d’une séance mémorable par sa dureté exceptionnelle et implacable des parlementaires européens. Pour le groupe des Verts, ce début de transparence ne légitime toujours pas l’ACTA. La française Sandrine Bélier à l’image de son chef de file ne rend pas les armes et souligne : « il s’agit d’une victoire indéniable pour la démocratie, mais ce n’est qu’une première étape. Ce début de transparence ne signifie pas légitimation d’une méthode de négociation qui reste exercée en dehors de tout cadre institutionnel et sans contrôle législatif, pas plus qu’il ne légitime un processus qui devrait être mené au sein d’institutions internationales existantes. Le contenu même de l’ACTA , qui vise à une mise en œuvre hors de proportion de la propriété intellectuelle, est inquiétant. Il menace l’accès aux médicaments génériques, l’accès aux savoirs et les libertés publiques et numériques. Des questions trop importantes pour être débattues hors de l’espace public et qui mérite un réel débat parlementaire.
Cette prise de position reprend largement une des thèses avancées de façon oblique lors du précédent débat en plénière, celle d’une certaine morale internationale : il reviendrait aux organisations internationales existantes compétentes de mener de telles négociations et non à une quelconque « Sainte Alliance » des plus puissants. L’UE a par avance répondu à cette critique en faisant valoir qu’il était illusoire d’espérer atteindre un quelconque résultat dans une enceinte plus large qui par ailleurs se heurterait tôt ou tard à un veto avoué ou déguisé de la Chine.
Texte consolidé intégral et aide-mémoire (background information) http://ec.europa.eu/trade/creating-opportunities/trade-topics/intellectual-property/anti-counterfeiting/