Certains Etats seulement souhaitent qu’un système européen de protection des femmes victimes de violences conjugales soit mis en place. Des difficultés techniques majeures, juridiques mais aussi dans les mentalités, devront cependant être surmontées. Des malentendus persistent entre certains pays et aussi la Commissaire Viviane Reding. Pourquoi un niveau européen ? Car la protection des victimes n’est pas toujours garantie – ou difficilement – en cas de déménagement à l’étranger.
En Europe, 100 000 femmes bénéficient de mesures de protection spéciales contre la violence conjugale, qu’elle soit physique, psychologique ou sexuelle. Ces mesures sont cependant nationales. Comment donc concilier la liberté de mouvement des victimes et leur protection ? Douze Etats souhaitent une protection au niveau européen – et ils sont rejoints par les députés européens. Le sujet est cependant complexe.
Les 27 Etats membres de l’Union européenne (UE) possèdent tous des systèmes juridiques différents. La protection des femmes victimes de violences ne se fait donc pas de la même façon d’un endroit à l’autre. De plus, une décision de justice ou de police prise dans un Etat membre n’est pas forcément directement reconnue dans un autre Etat.
Le but de l’initiative prise initialement par douze pays, parmi lesquels la France et la Belgique, vise à ce que toute femme protégée dans un pays le soit également si elle déménage à l’étranger, et ce sans avoir à recommencer des démarches longues et compliquées. Les députés européens souhaitent s’y associer et débattent d’un rapport qui devrait être voté en commission parlementaire le 22 juin.
L’idée peut paraître simple mais la mise en œuvre risque d’être compliquée. Les mesures de protection des femmes relèvent dans certains Etats de procédures pénales, dans d’autres de procédures civiles. Sur quelle base légale s’appuyer ? Commission européenne et Conseil de l’UE n’arrivent pas à s’entendre sur ce point. La première souligne les obstacles juridiques qui empêcheraient le bon fonctionnement de la mesure, le second insiste sur la nécessité d’un accord global et ambitieux. La présidence espagnole espère obtenir une majorité qualifiée. Le rapport parlementaire soutient l’approche espagnole, celle d’un champ d’application large, contrairement à l’approche d’un champ restreint au pénal.
« Les victimes sont les premières personnes que l’on oublie », selon Teresa Jiménez-Becerril Barrio (Parti populaire européen), rapporteur sur le sujet pour la commission des droits des femmes. « Ce n’est pas une initiative émanant de douze Etats ou de la présidence espagnole de l’UE, mais des milliers de femmes qui l’ont demandé, des milliers de victimes », d’après Carmen Romero López (Socialistes et démocrates), rapporteur pour la commission des libertés civiles. Elles espèrent qu’une solution sera trouvée rapidement.
Les rapporteures (Teresa Jimenez-Becerril Barrio et Carmen Romero Lopez) font remarquer que toute décision de protection européenne devrait s’appliquer à toutes les victimes des délits, comme les victimes de la traite des êtres humains, les femmes victimes de mutilations génitales, de mariages forcés, de crimes d’honneur, d’inceste, de violences fondées sur le sexe, les témoins, les victimes du terrorisme, et de la criminalité organisée, indépendamment de l’âge ou du sexe de la victime dès lors que l’agresseur a été identifié. Si la victime est trop jeune pour qu’une décision soit émise, un tuteur ou un représentant légal doit lui apporter son aide.
Les différences des systèmes juridiques tant au pénal qu’au civil ou à l’administratif créent un grande complexité mais cette complexité doit être surmontée et les victimes doivent en toute circonstance recevoir une information claire sur les mesures disponibles quel que soit l’Etat. La protection ne doit pas être seulement physique, mais aussi leur dignité en tant qu’être humain. La protection doit non seulement protéger la victime d’une seule personne, mais aussi la victime de groupes de personnes ce que ne fait pas l’initiative d’un groupe d’Etats membres qui ne prévoit pas non plus l’assistance morale, par exemple comment commencer une nouvelle vie tout en continuant à bénéficier des mesures de protection.
Le conseil du 3 juin arbitrera
Texte du rapport (FR)http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2009_2014/documents/femm/pr/817/817530/817530fr.pdf
(EN) http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2009_2014/documents/femm/pr/817/817530/817530en.pdf
Interview de Eva-Britt Svensson, présidente de la commission parlementaire du droit des femmes (FR) http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2009_2014/documents/femm/pr/817/817530/817530en.pdf