Saisi par quatre associations de l’existence d’un fichier de Roms, dénommé «fichier Mens», la Commission nationale informatique et libertés a adressé un rapport préliminaire au Premier ministre. La gendarmerie nationale utilise-t-elle un fichier particulier pour les «minorités ethniques non-sédentarisés (Mens, Ndlr)», qui ciblerait les Roms ? C’est à cette question que devait répondre la Commission nationale informatique et libertés.
Pour son enquête, la CNIL a mobilisé six contrôleurs répartis en deux équipes, qui se sont notamment rendus à l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (Ocldi), à Arcueil (Val de Marne), à Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). La plainte avait été déposée par quatre associations, dont «La Voix des Roms» et «L’Union française d’associations tsiganes». Après les contrôles effectuées les 8 et 12 octobre dernier, la Cnil a tiré des premières conclusions qui ont été transmises aux services du Premier ministre. S’il y a bien une dénomination «Mens» utilisée par la Gendarmerie nationale depuis 1992, elle ne cible pas une population en particulier.
Mercredi, le directeur général de la gendarmerie nationale, Jacques Mignaux avait été interrogé à ce sujet par la commission des Lois de l’Assemblée nationale. Le général Mignaux avait protesté contre une «tentative de déstabilisation» qui selon lui affecte l’honneur de la gendarmerie. «Nous n’avons pas de fichier ethnique. Mens est un acronyme, un vocable utilisé pour faciliter le classement et l’échange d’informations et non pour constituer des fiches. (…) Il s’agit d’une base de travail qui n’est pas un fichier ethnique», a-t-il notamment expliqué devant les députés. Le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, avait lui aussi réagi à la plainte des associations du 7 octobre dernier, en expliquant avoir retrouvé une note de la gendarmerie nationale du 25 mai 1992 – époque où la gauche était au pouvoir – faisant référence à la notion de «minorités ethniques non sédentarisées», sans que cela ne cible une ethnie particulière.
Mais la déposition du directeur de la Gendarmerie allait se révéler incomplète et peut prêter le flanc à la critique de mensonge par omission ou ignorance. Ignorant par la force des chose ces détails, le précédent bulletin( comme beaucoup d’autres) avait pris pour argent comptant les propos du directeur général de la Gendarmerie.
Sur un point la Cnil reste catégorique. L’Office central de lutte contre la délinquance itinérante utilise bien une base de 52769 fiches qui constitue donc un traitement de données à caractère personnel et ce, sans déclaration devant la Cnil. «Dans ces conditions, cette base de données n’est pas conforme à la loi», souligne le rapport. Cela étant, «les requêtes effectuées sur cette base (…) n’ont pas révélé de données relatives aux origines ethniques des personnes qui y sont contenues». De même, les services de l’Ocldi utilise le logiciel d’analyse sérielle Anacrim, là encore sans déclaration préalable devant la Cnil. Le logiciel établit des liens entre des personnes, des véhicules ou encore des numéros de téléphone, etc.). Le service technique de recherches judiciaires et de documentation ont également failli à leur obligation de déclaration devant la commission, ce qui fait écrire à celle-ci que la gendarmerie nationale, dans sa fonction de renseignements, ignore «largement la loi de 1978 modifiée en 2004». «Il est impératif pour la gendarmerie nationale d’opérer une régularisation», conclut la Cnil.
« Lors de cette première phase de contrôles, aucun fichier structuré regroupant des données à caractère personnel relatives aux « Roms » et organisé autour de cette notion n’a été décelé. Néanmoins il faut noter que certaines des informations enregistrées révèlent les origines ethniques des personnes contrôlées (mention est faite à de nombreuses reprises de la qualification de « Roms », susceptible d’être considérée comme une donnée sensible au sens de l’article 8 de la loi). En toute rigueur, cette pratique courante consistant à utiliser l’expression « ROM » ne pourrait être utilisé que par un décret en Conseil d’Etat, pris après avis de la CNIL, conformément à l’article 27 de la loi. »
A suivre…. « le présent rapport ne préjuge pas des résultats de contrôles qui doivent être encore opérés dans les prochains jours » a conclu « le Rapport Préliminaire »..
Analyse faite par bug brother : « qui surveillera les surveillants ? » http://bugbrother.blog.lemonde.fr/2010/10/14/la-cnil-decouvre-4-fichiers-illegaux-a-la-gendarmerie/