Il faut s’attarder un instant sur la dynamique de l’UDC et l’engrenage fatal qui a conduit au vote. Au sein de l’UE nous ne sommes pas immunisés contre cet emballement des passions. La démocratie directe ne doit pas devenir la poubelle aux émotions. Dans l’UE nous voyons à l’occasion du lancement de l’ICE, toutes sortes d’initiatives protestataires contre le fait que l’ICE serait bridée, limitée. Il ne faut pas oublier que le système constitutionnel de l’UE n’est pas celui de la Suisse et l’on ne peut sortir des Traités. Mais plus grave, tous ceux qui sont à l’initiative de pétitions et autres démarches, sont certes bien intentionnées, démocrates progressistes, mais ils perdent de vue qu’en ce moment la démocratie directe apporte malheureusement de l’eau au moulin des populismes, des extrémistes, xénophobes, racistes. Comment enrayer cette évolution funeste ? analysons d’un peu plus près le phénomène suisse, son expression depuis sa naissance jusqu’à son envol.
Le renvoi des criminels étrangers était déjà possible en Suisse sous certaines conditions, mais le texte proposé par l’UDC va plus loin en proposant un retrait automatique du droit de séjour des étrangers inculpés, sans prendre en compte la gravité des délits, le renvoi fonctionnant autant pour des crimes graves que pour les cas « d’abus de l’aide sociale » . Automaticité et absence de recours le caractérise ce que l’arrêt de la Cour européenne n’a semble-t-il pas voulu en autorisant l’éloignement du territoire d’un Etat membre de l’Union européenne d’un ressortissant de l’UE qui y était né (cf. autre information). En ce sens la déclaration du président de l’Assemblé parlementaire du Conseil de l’Europe, est pertinente.
En effet le Président de l’APCE s’est montré très préoccupé par le soutien de la population suisse au renvoi automatique des étrangers condamnés pour infractions graves . « Le soutien apporté hier par la population suisse à une initiative du Parti populaire visant à renvoyer automatiquement les étrangers condamnés pour des infractions graves est préoccupant pour l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) et les valeurs qu’elle défend », a déclaré, le lendemain de la votation, le Président de l’APCE, Mevlüt Çavusoglu. « Il est fort probable qu’une telle mesure d’expulsion, automatique et non susceptible de recours, ne serait pas conforme à la Convention européenne des droits de l’homme. De plus, l’expulsion automatique entraîne le risque de renvoyer des personnes dans des pays où elles pourraient être exposées à la torture ou à d’autres formes de persécution. Toute mesure d’éloignement doit respecter les dispositions de la Convention, en particulier l’interdiction de la torture, mais aussi le droit au respect de la vie privée et familiale et le droit à un recours effectif », a-t-il ajouté.
« Chaque jour, ici ou là en Europe, les principes de la Convention européenne des droits de l’homme sont remis en cause. Depuis Strasbourg, nous devons faire savoir qu’en ces temps difficiles, alors que le discours populiste exploite le ressentiment engendré par le ralentissement économique et la crise sociale, nous comptons nous battre encore plus résolument pour le plein respect des droits de l’homme. On observe actuellement des tendances anti-immigrants dans beaucoup d’Etats membres du Conseil de l’Europe. Il nous appartient, en tant que gardiens des droits de l’homme, de rester vigilants et de dire très clairement qu’aucune transgression des droits inscrits dans la Convention européenne des droits de l’homme ne sera tolérée », a-t-il conclu.
Et à juste titre, les critiques dans leur ensemble ont pointé du doigt cette absence de prise en compte de la proportionnalité des délits, l’automaticité des renvois et la violation du droit international. Alors que le contre-projet du gouvernement proposait, rappelons-le, de prendre en compte la gravité des délits, mais au coup par coup. Or, il a été repoussé à 54,2 %.
Les critiques furent très nombreuses, ont-elles pour autant fait progresser les choses ? Apparemment non, car la solution ne peut venir des opinions, aussi respectables soient-elles, mais des autorités fédérales suisses et des cours européennes qui ont pressenti l’imbroglio juridique qu’allait faire naitre une réponse positive à la question (cf. autre information dans Nea Say n°96). Les opinions ont leur importance car elles façonnent, à leur manière, une certaine morale civique. De ce point de vue la prise de position des Eglises a son importance. Les Églises suisses souhaitent que la Suisse reste «un État de droit fiable». Dans un communiqué commun publié dimanche 28 novembre, la Fédération des Églises protestantes de Suisse (FEPS) et la Conférence des évêques suisses (CES) souhaitent que la Suisse reste « un État de droit fiable, où les droits de l’homme constituent la référence centrale de tout acte étatique ». Les Églises estiment important « que ne s’implante pas dans la population une vue négative des migrants et des migrantes ». Mgr Norbert Brunner, évêque de Sion et président de la CES, a dit à la radio son espoir « que les chambres tiennent compte concrètement de l’éthique chrétienne dans l’élaboration de la loi d’application ». Pour la FEPS et la CES, « avant l’expulsion, chaque cas est à examiner avec soin ».
Après le vote contre les étrangers criminels, dimanche 28 novembre, et l’initiative anti-minarets il y a un an, de nombreuses voix appellent à une réflexion sur l’avenir des droits populaires au sein de la Confédération. Ancrée dans une longue tradition, la démocratie directe est l’un des piliers du système politique suisse. Si cette pratique a fait ses preuves dans le passé, plusieurs juristes et personnalités politiques accusent les populistes de récupérer ce droit, dans le seul but de faire grandir leur parti, quitte à violer les lois internationales. L’acceptation, dimanche 28 novembre, de l’initiative de l’Union démocratique du centre (UDC) visant à durcir le renvoi des étrangers criminels relance un débat déjà amorcé lors de scrutins précédents. Au lendemain du vote contre les minarets, il y a un an, François Cherix remarquait en effet, dans le quotidien suisse Le Temps, que « la peur, le préjugé, le mépris peuvent trouver dans l’anonymat des urnes l’exutoire que n’offre pas la vie en société ». Pour ce politologue et député socialiste, initiateur du Centre pour la réforme des institutions suisses (Cris), il n’est pas question de renoncer aux droits populaires, mais il est important d’y associer « de puissants garde-fous ».
D’où un constat et des recommandations : en premier lieu, les deux chambres sont trop politisées. En conséquence et en premier lieu : mieux encadrer la possibilité donnée aux citoyens de lancer une initiative. Actuellement, il suffit de réunir 100 000 signatures pour proposer une modification de la Constitution, soit 1,3% seulement de la population et 2% des électeurs. François Cherix dénonce également la « complaisance » du Parlement à l’égard du populisme, en acceptant des « initiatives douteuses ». « Les deux chambres [Conseil national et Conseil des États] sont trop politisées. Plutôt que de refuser une initiative contraire au droit international, les députés et sénateurs préfèrent la laisser passer ou proposer un contre-projet, de peur de perdre des électeurs », constate un observateur perspicace.
Pour éviter un véritable casse-tête pour sa mise en application il faudrait ( et on devrait) pouvoir justifier la validation d’une initiative, les parlementaires et démontrer alors sa conformité avec le noyau dur du droit international celui interdisant par exemple la torture, le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, le mauvais traitement des personnes, les droits fondamentaux auxquels la Suisse a d’ailleurs souscrit. Car une fois l’initiative acceptée par le peuple, c’est une protestation générale au niveau international et, au niveau de la Confédération, mais aussi un véritable casse-tête pour sa mise en application . C’est ce qu’a bien compris la Commission européenne qui s’est refusée à toute condamnation et a déclaré attendre les modalités de la mise en œuvre et dans l’attente faire pleinement confiance aux autorités suisses pour qu’elles respectent leurs engagements internationaux. Il faut trouver un moyen d’éviter que le peuple ne lance des initiatives qui violent des droits humains garantis au niveau international ont affirmé d’éminentes personnalités suisses. Ajoutons que c’est ce que les institutions européennes se sont efforcées de faire pour l’Initiative citoyenne européenne( ICE) au point d’essuyer de sévères reproches.
Sans pour autant remettre en question la démocratie directe, des juristes, de plus en plus nombreux, reconnaissent, à leur tour, qu’il est nécessaire de donner à la démocratie directe des limites. Selon eux, ce n’est pas au Parlement de décider de la validité d’une initiative : ces questions ne peuvent pas être décidées par des organes politiques, mais par des juges. Les droits humains sont des questions délicates. Plusieurs voix se recoupent ainsi autour de la nécessité de la création d’une Cour constitutionnelle en Suisse et appellent le Conseil fédéral à s’engager dans une réforme des institutions. Une opinion également partagée par des membres du gouvernement lors de discussions informelles dans les couloirs de Berne. Encore faut-il que les citoyens helvétiques acceptent l’évolution d’un système démocratique qui fait la particularité de leur pays. Sur ce point reconnaissons que l’Union européenne est mieux équipée et le droit européen, les arrêts de la Cour de Justice européenne prévalent sur le droit national et les décisions des Cours fussent-elles constitutionnelles.
A ce stade, interrogeons nous pour savoir comment on en est arrivé là, l’originalité et les insuffisances « constitutionnelles » suisse n’explique pas tout : c’est là qu’intervient le facteur politique de l’UDC. Avec le succès de ses deux initiatives contre les minarets et pour l’expulsion des étrangers criminels, l’UDC vise désormais 33 % de l’électorat.
Le lundi 29 novembre, à Berne, pour l’ouverture de la dernière session parlementaire de l’année, l’ambiance était un peu morose, accablée par ce qui est perçu, à tort, comme une fatalité par les parlementaires du centre droit et de la gauche. Avec l’acceptation de l’initiative de l’UDC pour le renvoi des étrangers criminels, plus aucune stratégie ne leur semble capable de stopper la progression de l’UDC. Sûr de lui, le vice-président de l’UDC, Yvan Perrin, espère crever le plafond du tiers de l’électorat aux élections de l’automne 2011. «Si nous travaillons bien, si nous continuons à miser sur le militantisme, si nous nous concentrons sur nos thématiques porteuses, 33%, c’est jouable», affirme-t-il. Le thème des étrangers, les questions identitaires, les peurs face à la globalisation sont devenus le fonds de commerce de l’UDC et, manifestement, l’investissement rapporte. Deux initiatives acceptées coup sur coup : contre les minarets, il y a un an, et, dimanche, pour le renvoi des étrangers criminels. « L’UDC est cette fois entrée dans une nouvelle période. Avant, c’est elle qui imposait l’agenda et les thèmes du débat public. Aujourd’hui elle change le cours de la politique, elle parvient à imposer ses décisions», analyse Oscar Mazzoleni, politologue et spécialiste de l’extrême droite. Jamais en France Jean-Marie le PEN n’a été en mesure de simplement rêver d’une telle situation. Pour le professeur Georg Lutz, de l’Université de Lausanne, «la grande victoire de l’UDC c’est déjà d’avoir fait accepter dans la société des thèmes, des positions et un style de discours qui nous étaient étrangers ou inacceptables il y a une dizaine d’années». La conjugaison entre l’expulsion des étrangers et celle du durcissement des sanctions pénales a permis d’attirer un électorat qui va bien au-delà de la base électorale de l’UDC. Le parti ne va donc pas s’en priver, avertissent les responsables de l’UDC. La question de la libre circulation des personnes et des conséquences de l’accord de Schengen sur l’augmentation de la criminalité, notamment à Genève, va s’inviter d’elle-même, au débat. On évoque déjà le lancement possible d’initiatives pour renforcer les conditions de la naturalisation, limiter l’immigration ou serrer encore la vis à la politique d’asile. Ou encore une initiative sur le durcissement du code pénal avec la réintroduction des courtes peines privatives de liberté. Sur les questions symboliques, identitaires, l’UDC « fait effectivement très fort ». Mais sur les problèmes de vie quotidienne, les questions sociales ou de société, l’UDC est moins conquérante et moins convaincante, estime-t-on. Et l’élément de centre gauche ou de gauche envisage avec un peu plus d’optimisme(sans doute excessif) d’affronter l’UDC sur le dernier dossier qu’elle s’est choisi, l’école. L’UDC veut mettre fin aux expériences de l’harmonisation inter-cantonale et des méthodes globales, revenir à une école plus cadrée, qui enseigne les disciplines de base, avec un maître qui se fasse respecter etc… bref une reprise en main. L’UDC est sûr de tenir une vraie préoccupation des parents ce qui devrait élargir la gamme trop monothématique de son parti, à savoir les immigrés. Quel que soit le contenu de la prochaine initiative, l’idée serait de la lancer l’an prochain encore, en année électorale, pour servir de thème de campagne, puis arriver en votation populaire juste avant les élections suivantes.
C’est la grande force de l’UDC, (et de tous les mouvements populistes en Europe) de savoir détecter un malaise dans la population et le transformer en problème pour le placer au centre de l’agenda politique.
La progression de l’UDC ne sera stoppée que lorsque les autres partis auront trouvé un style de discours approprié, une stratégie politique appropriée, plus inventive, un discours plus subtile Tous finissent par admettre qu’au centre droit, PDC et PLR sont prisonniers de la culture du consensus et de la concordance qui permet encore au Conseil fédéral de fonctionner et , bien plus grave, l’ UDC et Parti socialiste tirent profit de la confrontation, de la polarisation politique. Un constat qui peut être fait ailleurs en Europe. En Suisse alémanique, fait-on remarquer, l’UDC profite de l’absence de débats argumentés dans les médias, au profit des affrontements. L’UDC gagne les référendums mais ses succès lors de votations ne se traduisent pas directement en électeurs. En polarisant une majorité contre elle, l’UDC ne parvient toujours pas à gagner des élections au système majoritaire. C’est sa faiblesse.
Les limites de la droite nationaliste, c’est peut-être son propre style. Ses succès se nourrissent de la provocation permanente. Il faut surenchérir à chaque campagne de votation, comme on vient de le voir avec les affiches pour le renvoi des étrangers criminels.
Toute cette description faite par les politologues suisses a, par certains aspects, un arrière-goût de déjà vu ailleurs en Europe. Tirons en toutes les leçons pour nous en prémunir. Mais nous n’avons pas encore épuisé l’enchaînement des séquences négatives, potentiellement au moins, par la charge explosive de confrontation qu’elles recèlent. Des musulmans suisses veulent abroger l’interdiction de minarets. Plus de 57% des Suisses s’étaient prononcés il y a un an pour interdire la construction de nouveaux minarets, une « votation » dont l’issue avait attiré sur le pays l’opprobre international. Même le gouvernement fédéral avait jugé cette initiative contraire à la Constitution. L’ organisation des initiateurs du référendum, le CICS, prédit qu’un nouveau référendum sur le sujet donnerait aujourd’hui un résultat différent. Or le CICS a été exclu en mai du dialogue interculturel sous l’égide du Bureau fédéral de la migration pour avoir refusé de condamner le principe du châtiment des femmes par lapidation. Environ 350.000 musulmans vivent en Suisse (sur 7, 7 millions d’habitants) dont un bon nombre a la citoyenneté suisse. Pour organiser un nouveau référendum sur les minarets, les musulmans suisses devront recueillir au moins 100.000 signatures. Chacun perçoit le haut niveau de dangerosité que comportent de telles situations et le potentiel de propagation bien au-delà du territoire suisse. On comprend l’angoisse de l’éditorialiste du journal suisse le Temps, rapporté dans une autre information de Nea say, on comprend l’angoisse contenue dans l’appel des évêques de la COMECE contre les populismes en Europe (cf. autre information de Nea say).
Mais le dernier mot n’est pas encore dit, il faut attendre la mise en œuvre qui est loin d’être acquise. Peut-être aurons-nous de premières indications lors de la réunion des ministres de la Justice et des Affaires intérieures des 3 et 4 décembre à laquelle participera la conseillère fédérale suisse Simonetta Sommaruga en sa qualité de représentante de l’espace Schengen. Les experts suisses et de l’Union européenne discutent déjà…Sans faire référence explicitement au cas suisse et avant que ne soient connus les résultats du référendum le président Barroso sur la radio Europe 1 avait exprimé une crainte générale face à une poussée nationaliste, chauviniste, xénophobe et d’un populisme très agressif. L’issue est à rechercher dans un effort de discipline et d’engagement de la part de ceux qui refusent populismes et extrémismes : ne pas leur laisser de l’espace pour manœuvrer, prendre des initiatives, ne pas introduire une complicité perverse, souvent inconsciente et involontaire, mais aussi souvent calculatrice. Ne pas laisser un engrenage fatal se mettre en branle et couper court et vite dès qu’apparaissent les toutes premières manifestations de racisme, extrémisme populisme, encore à peine ébauchées à l’état naissant. C’est ce que nous apprend l’expérience suisse alors que manifestement une majorité de suisses ne veulent pas d’une telle évolution.
LA DEMOCRATIE DIRECTE est la garant de la démocratie et ne peut en aucun cas fait l’objet de compreomis et dans le mot « compromis » il y a « compromission » et c’est TOUT DIRE.
L’Europe comme on a pu le voir dans différentes consultations électorales voir électoralistes n’est pas démocratique et les citoyens l’ont attesté à plusieurs reprises. Au contraire elle refait et refait les consultations jusqu’a ce que les électeurs cahngent d’avis par des compromis voir « l’achat du vote » par la corruption.
La SUISSE est peut-être un paradoxe en tant que paradis fiscal mais comment peut-on accepter que l’Europe est en son sein des paradis fiscaux et délègue des mandats à ces représentants là comme le Luxembourg par exemple ?
L’Europe n’est d’abord pas POLITIQUE et encore moins démocratique.Nul ne peut s’opposer à ce qu’un pays pratique la DEMOCRATIE POPULAIRE CITOYENNE, premier droit des libertés qui ne peut et ne pourra jamias être contesté à défaut d’une vraie REVOLUTION contre les fonctionnaires grassement payés de Bruxelles.Voyez la montée du POPULISME contre les abus des ELUS et la corruption ambiante !