L’Union européenne consacre trop peu d’argent à la lutte contre le terrorisme alors que ses réseaux de transport ne sont pas suffisamment protégés, a prévenu le jeudi 2 décembre Gilles de Kerchove. Le Coordinateur européen de la lutte contre le terrorisme, Gilles de Kerchove a invité les Vingt-Sept à accroître leur aide au développement pour les régions où opèrent des groupes extrémistes telles que le Yémen, le Pakistan ou l’Afrique sub-saharienne. Il les incite également à apporter un soutien financier aux autorités locales pour les aider à lutter contre l’extrémisme.
« Il faut un changement d’échelle dans le montant que l’UE consacre à l’aide à la lutte contre le terrorisme », souligne-t-il dans une présentation écrite que les ministres de l’Intérieur de l’Union européenne ont examiné lors de leur réunion du 2 décembre. « Si l’UE veut devenir un acteur de premier plan dans la promotion de la stabilité internationale (…) elle doit y consacrer les ressources adéquates », ajoute-t-il.
Lors de cette réunion, les ministres de l’Intérieur se sont penchés aussi sur un renforcement de la sécurité du transport aérien de marchandises après la découverte en octobre de colis piégés à bord d’avions-cargos à destination des Etats-Unis. La question du partage avec Washington des données sur les passagers a été abordée. Dans sa présentation, Gilles de Kerchove souligne que le transport aérien reste l’une des cibles prioritaires des extrémistes islamistes mais que le réseau terrestre européen est mal protégé face aux risques d’attentats. « Nous devons procéder à une analyse plus poussée des failles dans la protection des principaux éléments des infrastructures de transport terrestre », dit-il. « Comme l’aviation est de plus en plus sûre, il y a un risque évident que les terroristes ciblent le transport terrestre. »
Après les récentes menaces d’attentats, intensément relayées par les médias,, menaces dans divers pays européens et l’interception de matériels qui auraient pu exploser à bord d’avions-cargos en route pour les Etats-Unis, le renforcement des mesures de sécurité aérienne a été également examiné par les ministres (cf. page 8 du communiqué de presse http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/jha/118183.pdf ) Des experts ont mis au point un plan d’action détaillé dont seulement quelques mesures seront mises en œuvre dans l’immédiat, la volonté étant d’améliorer le contrôle sans perturber l’activité et le bon fonctionnement du secteur des transports. On va renoncer probablement à établir une liste noire des aéroports réputé à risque dans les pays tiers.
Les Vingt-Sept doivent en outre adopter une stratégie globale pour éviter que des Européens aillent recevoir des formations dans des camps extrémistes à l’occasion de voyages dans des zones de guerre éloignées, dit-il. « La majorité des complots mis au jour ces dernières années implique de tels ‘combattants étrangers' », écrit Gilles de Kerchove, qui propose de rendre passible de poursuites judiciaires la participation à de tels camps de formation extrémistes. La principale menace provient aujourd’hui de jeunes islamistes radicaux entraînés au Yemen, en Somalie au Pakistan, en Afghanistan et revenant en Europe soit pour y recrutée d’autres combattants, soit pour y préparer d’autres actions. Ce phénomène en plein développement, nécessite une approche cohérente qui ne peut se limiter à un renforcement des contrôles aux frontières.
Le rapport évoque le besoin d’un contrôle plus stricte des visas et des passeports ainsi qu’une meilleure collaboration avec les pays de transit comme la Turquie ou de destination comme le Pakistan et l’Afghanistan. Europol devrait enquêter sur les liens entre les cellules islamistes et le crime organisé sur les routes empruntées par les réseaux ainsi que sur les techniques qu’ils utilisent pour parvenir clandestinement dans certaines zones.
Le rapport souligne enfin l’obligation de voir le Service Européen d’Action Extérieure (SEAE), le bras de l’action diplomatique de l’UE, intégrer dans ses activités la dimension contre-terroriste, en se dotant des moyens nécessaires pour aider les pays auxquels l’Europe demande de se montrer plus efficace dans la lutte contre le terrorisme .
L’intervention de Gilles de Kerchove et son rapport ont été « le plat de résistance » de la réunion. http://register.consilium.europa.eu/pdf/en/10/st15/st15893-ad01re01.en10.pdf http://register.consilium.europa.eu/pdf/en/10/st15/st15893-ad01.en10.pdf . Ce sont finalement cinq priorités qui ont été finalement retenues.
– . la sécurité dans les transports : un comité pour la sécurité dans les transports terrestres notamment en matière d’infrastructures doit venir compléter ce qui existe déjà pour le maritime ((MARSEC) et l’aérien (AVSEC) ;
-. les voyages des terroristes dans les zones de conflits (Yemen, Somalie, Pakistan, Afghanistan) en étendant la surveillance aux pays de transit et en renforçant la coopération avec les Etats-Unis ;
-. le cyber-terrorisme par la mise en place d’un authentique EU Computer Emergency Response Team (CERT) : évaluation par les pairs,, code de conduite pour l’Internet, développement d’une capacité technique et industrielle dans un domaine où l’UE a perdu sa capacité en matière de composants des réseaux ;
-. le développement de la dimension extérieure de la lutte contre le terrorisme en affectant les ressources appropriées pour lutter contre le terrorisme ;
-. le combat contre la discrimination et la marginalisation sociale des personnes d’origine musulmane .
Enfin a été rappelée la nécessité de mettre en œuvre la clause de solidarité du Traité de Lisbonne (Art. 222 TFEU)
Rappelons que le cadre de l’action a été fixé en novembre 2005 http://register.consilium.eu.int/pdf/en/05/st14/st14469-re04.en05.pdf
En définitive, le Conseil va concentrer ses conclusions sur le rôle de la police (de proximité notamment projet COPPRA) )et de la société civile (Projet RAVIPO) dans la lutte contre la radicalisation violente et le recrutement de terroriste. Résultat assez maigre, cinq ans après le lancement de cette action prioritaire au lendemain des attentats de Londres de juillet 2005 (révisé en 2009) Texte des conclusions http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/fr/jha/118142.pdf
Le partage des informations et le rôle du SITCEN a également retenu l’attention des ministres : les Etats membres doivent informer le plus précocement possible sur le niveau de menaces, qu’il s’agisse des points de contact ou du Cosi sans parler des autres institutions, de Europol ou du coordinateur de la lutte contre le terrorisme :texte des conclusions http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/jha/118175.pdf