Nea say a consacré une trentaine d’articles à ce sujet qui divise de façon passionnée les Etats et les parlementaires. Au Parlement européen une position n’a pu être trouvée qu’après une intense bataille sur le fond et la procédure. Le Conseil vient de tenir (le 6 décembre) ses premiers débats d’orientation depuis que le Parlement européen a adopté sa position en première lecture demandant notamment l’allongement de la durée du congé de maternité minimale à 20 semaines, intégralement rémunérées ainsi que l’insertion d’un congé de paternité de 2 semaines, pleinement rémunéré également pour ne reprendre que deux aspects, les plus controversés. Des conclusions ont pu être dégagées à grand peine par la présidence belge sur la manière dont il convient de mener la suite des travaux. Le coût insuffisamment évalué est source de blocage mais aussi, pour beaucoup d’Etats membre, les traditions et habitudes nationales.
Le Conseil a dès lors procédé à un débat utile et important sur la proposition modifiant la directive « congé de maternité » et a examiné les éléments les plus controversés qui figurent dans la position du Parlement européen en première lecture et qui font débat parmi les Etats membres. C’est dans cette perspective que la Présidence avait élaboré un questionnaire destiné à orienter le débat. Sur la base du débat des ministres, la Présidence a été en mesure de tirer des conclusions sur la manière de procéder dans cet important dossier.
Déroulement des débats et positions des délégations :
A une très grande majorité, les Etats membres ont exprimé leur refus de pour considérer la position du Parlement européen comme une base de compromis possible. Telle est aussi la conclusion qu’a tirée la présidence belge par la voix de Joëlle Milquet, mais des passerelles restent possibles entre cette proposition sur les congés de maternité et d’autres congés. En revanche la proposition initiale de la Commission demeure comme base de compromis possible. Le temps est nécessaire pour trouver une position acceptable en vue d’une position en première lecture. Le temps est d’autant plus nécessaire que l’avis des partenaires sociaux est à rechercher : ils doivent être impliqués d’une façon ou d’une autre dans le compromis final. Il revient comme proposé par la présidence belge que les présidences belge, hongroise et polonaise présentent un document permettant au débat de se poursuivre sur une base pragmatique.
Une éclaircie supplémentaire apparait dans le document signé par la République Tchèque, le Danemark, l’Estonie, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Slovaquie, la Suède, le Royaume-Uni et Malte : le document indique qu’une étude d’impact sur les amendements du Parlement permettrait de repartir sur une base de compromis plus raisonnable et d’avoir un échange de vues réaliste sur l’impact financier, économique et social dans chaque Etat membre de la proposition de la Commission et des amendements du Parlement européen.
La future présidence hongroise, le ministre, le ministre Miklos Rethelvi, reste confiant malgré le rejet de plusieurs Etats : il espère trouver une issue en approfondissant l’examen de la proposition du Parlement, pour lui il est fondamental de progresser de manière souple qui permettrait de mener avec succès des négociations avec le Parlement européen. Entretemps les travaux se poursuivront au sein du groupe de travail du Conseil.
Pour la future présidence polonaise du second semestre 2011 et le vice-ministre Radoslav Mleczko un compromis sur la base des propositions du Parlement est quasiment impossible à accepter: ce n’est pas possible pour nos concitoyens. Les Etats membres ont leurs propres règles et un compromis ne peut se faire que sur des exigences minimales et sur le fait que les Etats membres seront amenés à respecter leurs règles spécifiques établies sur la base d’une analyse d’impact.
Parmi les autres intervenants au cours du débat, l’Espagne a estimé que cette directive est viable parce qu’elle permet un dialogue responsable avec le Parlement. La France a dit clairement qu’elle avait un problème de fond avec le Parlement parce qu’il ne prend pas en compte suffisamment la subsidiarité et le dialogue social.. Pour la Finlande, un salaire intégral représente un coût trop élevé pour l’employeur. La convention collective qui est à la base du système finlandais est ce qui s’applique le mieux sans ce cas. Pour la Suède, le congé de maternité doit être un droit et non une simple obligation. Pour l’Italie le versement intégral des derniers salaires de la travailleuse accouchée est inacceptable : elle n’a pas de raison fondamentale pour rejeter cette directive, mais en période de crise il faut analyser les coûts et le préférence de l’Italie va à une indemnité représentant un pourcentage, à ce stade non encore défini, du salaire ; L’Irlande s’est dite préoccupée par le coût des salaires pour l’industrie et les secteurs concernés, mais aussi en matière de sécurité sociale. Aux Pays-Bas, il existe un socle minimal de 16 semaines avec indemnité à 100% pour les mères. Quant aux pères, ils ont la possibilité d’utiliser leurs congés mais sans salaire. C’est pourquoi, les Pays-Bas demandent de retenir le respect des choix individuels. Pour la Lituanie, la directive doit garantir la flexibilité pour les Etats membres sans les empêcher de développer leurs systèmes sur la base de leurs traditions et de leurs possibilités financières et aussi longtemps qu’elle ne connaîtra pas la charge financière, la Lituanie ne se prononcera pas : nous devons procéder à une analyse d’impact. Le Portugal a rappelé qu’il a toujours soutenu les propositions d’amendements du Parlement sans oublier de faire le lien entre congé de maternité et la santé et la sécurité sur le lieu de travail tout en promouvant l’égalité entre les hommes et les femmes. Pour l’Autriche, la Directive ne doit viser que la santé de la mère et des enfants et une disposition sur les congés des pères n’a pas sa place dans cette directive.
Réactions des parlementaires européens :
Les commentaires des parlementaires européens ont fait ressurgir les clivages anciens ce qui ne laisse pas présager un revirement de la position dominante du Parlement ou un mouvement en direction d’un compromis. Pour l’instant la balle reste dans le camp du Conseil.
Rapporteur sur les congés de maternité, Edite Estrella (S&D, portugaise) a bien évidemment critiqué vigoureusement la décision prise par les ministres de l’Emploi et des Affaires sociale : « cette décision montre que le Conseil n’a pas tout à fait compris le rôle attribué au Parlement européen par le traité de Lisbonne » a-t-elle déclaré. Elle a toutefois remercié la présidence belge et hongroise pour leur engagement et leur détermination et les efforts pour atteindre un compromis avec le Parlement. Elle a réaffirmé sa disponibilité à travailler à la recherche d’un accord qui répondra aux besoins des familles sans pénaliser l’économie.
Elisabeth Morin-Chartier(PPE, française) a lancé un appel au Conseil européen et à la Commission pour une nouvelle proposition allant dans le sens d’un congé de maternité allant dans le sens d’un congé de maternité de 18 semaines plafonné, afin d’aboutir à un accord favorable pour les femmes. Pour elle, il est important que ce texte fasse preuve d’imagination et d’innovation pour présenter des mesures efficaces et pour concilier vie professionnelle et vie familiale, telles que plus de crèches, plus d’adaptation du temps de travail au rythme familial pour le père comme pour la mère. Il faut également des mesures d’accompagnement à la sortie du congé de maternité pour faciliter le retour au poste de travail.
Marina Yannakoudakis (ECR, britannique) a estimé que ce n’est pas à l’UE de décider de la durée du congé que doivent prendre les nouvelles mères. Cela relève de la compétence des gouvernements nationaux et du choix personnel. Pour madame Yannakoudakis, ces propositions auraient réduit le droit des femmes à choisir et auraient eu pour conséquence que les jeunes femmes aient moins de chance de retrouver un emploi.
Les principales conclusions du débat sont pour la présidence belge les suivantes :
– une très large majorité de ministres a considéré que les positions du Parlement notamment sur l’augmentation de la durée du congé à 20 semaines allaient trop loin et ne pouvaient constituer une base de compromis à ce stade ;
– une très grande majorité des délégations a par ailleurs considéré la proposition initiale de la Commission comme base acceptable de compromis et exprimé son attachement aux objectifs que sont la protection de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes et la conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée. La discussion a permis dès lors dindiquer la volonté du Conseil de poursuivre les travaux sur la base de la proposition de la Commission, en vue de définir une position du Conseil en première lecture en se donnant le temps d’aboutir à un accord équilibré ;
– il existe par ailleurs une ouverture d’un grand nombre de délégations relative aux clauses passerelle et un souhait d’une éventuelle implémentation échelonnée dans le temps ;
– par contre, certains Etats membres semblent préférer ne pas traiter du congé de paternité dans le cadre de la directive relative au congé de maternité.
La Présidence belge a annoncé l’envoi prochain d’un document de la présidence qui sera, à sa demande, coordonné avec les Présidences hongroise et polonaise, document qui établira la feuille de route des travaux des prochains mois et sera rapidement transmis aux délégations. Ce document fera état des propositions concrètes d’initiatives complémentaires à entreprendre pour poursuivre le processus de décision et alimenter les travaux du Conseil en vue de la définition d’une position commune. La Présidence s’est réjouie de l’intention des futures Présidences hongroise et polonaise de poursuivre les travaux sur la proposition.
L’impact économique présumé des ces mesures a joué un rôle important dans les débats : à cet égard, espérons que les études d’impact annoncées et réclamées par les opposants permettront de déboucher sur une solution. Interrogeons-nous aussi sur le fait suivant : un allongement du congé de maternité ne réduirait-il pas les congés maladies et les absentéismes d’après le congé de maternité qui chacun peut le constater sont importants.