…Viktor Orban se rebiffe, mais le match de ping-pong semble terminé ! Le premier ministre hongrois multiplie les déclarations d’ouverture, même s’il a réservé à la France ses flèches les plus acérées. L’étau se resserre : pas d’autre alternative que de modifier la loi sur les médias dans un climat désormais plus apaisé.
La Hongrie est restée ferme dans un ultime baroud d’honneur : face aux critiques contre sa loi , elle s’en ait pris fortement à la France en particulier. « Il n’appartient pas aux Français ou aux Allemands » de juger de la conformité d’une législation nationale avec les règles de l’UE, mais à la Commission européenne, a dit Viktor Orban, réagissant aux appels de Paris et Berlin à modifier le texte. Il a exhorté la France à revenir « à la réalité » et à des propos « rationnels ». « Je ne me souviens pas que la Hongrie ait jamais critiqué la loi française sur les médias », a rétorqué le chef du gouvernement hongrois. Il a ainsi relevé que son pays ne disposait pas, contrairement à la France, d’une loi prévoyant que le pouvoir nomme le président de la chaîne de télévision publique de son pays. « Et je n’ai jamais dit qu’il s’agissait d’une loi antidémocratique », a-t-il souligné.
« Oui, c’est un mauvais départ » pour la présidence semestrielle de l’UE, prévue jusque fin juin, « nous n’aurions pas souhaité débuter comme cela », a reconnu le premier ministre hongrois, Viktor Orban. « Naturellement, la Hongrie acceptera toute procédure que l’Union européenne déclencherait », a-t-il ajouté. « Cependant, le principe le plus important en Europe est la non-discrimination », a-t-il jugé. Il a qualifié du coup de « prématurée » et « inutile » la réaction de Paris et de Berlin.
A Paris, le ministre des affaires européennes français, Laurent Wauquiez, a cherché à calmer le jeu : « Il ne s’agit pas de donner des leçons à qui que ce soit », a-t-il déclaré, affirmant que Paris n’espérait qu’un « travail sérieux, objectif » entre la Hongrie et la Commission européenne qui permette, le cas échéant, de corriger « des problèmes ». Dans un entretien au journal la-Croix il a précisé sa pensée. Laurent Wauquiez reconnaît que les textes adoptés par Budapest « soulèvent de nombreuses questions ». Il rappelle le désaccord des autorités françaises sur l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’espace Schengen. Laurent Wauquiez : Il ne faut pas confondre la situation intérieure d’un pays et la présidence européenne. Je reste confiant dans la capacité de la Hongrie à exercer une bonne présidence. Elle a fait un travail de préparation très sérieux et elle servira l’intérêt général européen. Il est vrai qu’elle a adopté des textes qui soulèvent de nombreuses questions et qui n’arrivent pas au bon moment. Sa loi sur les médias en est un. La liberté d’expression de la presse fait partie du socle démocratique européen.Il faut procéder à une analyse objective de cette loi, qui crée une autorité de régulation et un mécanisme de sanctions et de recours. La Commission européenne, qui est la gardienne des traités, est dans son rôle en procédant à cette analyse.
A Berlin, une porte-parole du gouvernement a indiqué suivre « avec beaucoup d’attention » le sujet et a demandé à Budapest de modifier sa loi si l’UE le lui demandait.
C’est le ministre des affaires étrangères hongrois, Janos Martonyi, qui le premier a ouvert la porte d’une issue en laissant entendre clairement que son pays pourrait revoir la loi sur les médias. « Il est prématuré de dire si les autorités hongroises vont modifier la loi encadrant le fonctionnement des médias. Attendons les commentaires de la Commission européenne et nous verrons comment remédier à la situation, si nécessaire. (…) Nous verrons quels types de commentaires, de critiques seront faits et nous pourrons nous asseoir pour discuter ». Dans le même temps le chef de la diplomatie hongroise a jugé « disproportionnés et excessifs » certains commentaires exprimés en Europe : « je ne vais pas dire que cela facilite notre travail » de présidence de l’UE. Beaucoup de déclarations « sont simplement fausses » . Des critiques ont été faites « sans avoir lu le texte ».
Viktor Orban avec des nuances et un style différent lui a emboité le pas ! Il a annoncé: « La Hongrie acceptera toute procédure entamée par l’UE. » Avec une nuance toutefois… « Si ce passage de la loi hongroise sur les médias est amendé, alors les lois sur les médias en France, en Allemagne et aux Pays-Bas devront également être modifiées, puisqu’il n’y a rien dans notre législation qui ne soit dans leurs lois sur les médias », a-t-il ajouté. « Nous sommes dans l’Union européenne, il y a des règles du jeu », a insisté Viktor Orban devant la presse étrangère. Mais si la Hongrie est enjointe à respecter les directives européennes en matière de protection des médias, cela se fera à condition que le reste de l’Europe l’imite et balaye aussi devant sa porte. « Je défie quiconque de trouver dans notre loi quelque chose qui ne figure pas dans les lois sur les médias des autres Etats membres », a-t-il affirmé.
Le premier ministre hongrois a confirmé ses propos dans le contexte plus solennel de la conférence de presse commune avec le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso : la Hongrie modifiera sa loi si l’Union européenne l’exige. Comme il l’a répété, il ne souhaite pas hypothéquer gravement sa présidence. « Si des changements sont nécessaires, nous changerons » le texte, a-t-il déclaré lors de la conférence de presse qui marquait le début de cette présidence semestrielle hongroise, « mais il ne faut pas de pressions, de campagnes » d’opinion à ce sujet. « Si des craintes, quelles qu’elles soient, s’avèrent fondées » à l’issue de l’examen du texte par la Commission, actuellement en cours. « Nous serons à même de trouver des solutions », a-t-il ajouté. Le premier ministre a assuré ne pas vouloir faire de ce dossier « une confrontation » ou « une question de prestige » pour son pays. Le désir de calmer le jeu, comme ses partenaires, est évident.
Calmant les esprits, vendredi 6 janvier, Viktor Orban a notamment fait référence à un point particulier qui inquiète la Commission, chargée de veiller au respect des traités, à savoir la composition de la nouvelle autorité de contrôle des médias en Hongrie, que ses détracteurs ne jugent pas assez indépendante du pouvoir politique. « Si le verdict juridique de l’UE conclut qu’il y a trop de concentration » de personnes proches du pouvoir dans cet organisme, « nous en discuterons et nous changerons cela », a promis Viktor Orban. « Mais, je suis certain que tel ne sera pas le cas. »
Le président de la Commission, José Manuel Barroso, a cherché lui aussi à faire tomber la fièvre des derniers jours : « J’ai reçu l’assurance du premier ministre que la loi sera mise en œuvre dans le respect total des valeurs de l’UE et de la liberté des médias. » Au passage il a signalé que la Commission n’avait pas encore reçu la notification officielle du texte de la transposition de la directive européenne. La Commission a certes reçu un texte en langue anglaise de 194 pages (cf. autre information) dont on souligne déjà les différences avec le texte original hongrois. Une notification officielle serait donc susceptible de lever les incertitudes quant à l’existence d’un texte authentique, enfin stabilisé.
Il a dans le même temps lancé un avertissement à peine voilé, exhortant le gouvernement hongrois à ne pas torpiller sa présidence en laissant la controverse s’installer. « Aux côtés de l’aspect juridique, il y a aussi un aspect politique ici. Il est nécessaire que la Hongrie bénéfice du plein soutien des Etats membres et des institutions de l’UE pour faire de cette présidence un succès », a-t-il prévenu. C’est une forme de rappel à l’ordre déguisé. Le travail qui attend l’UE est lourd, important et elle ne doit pas se laisser dérouter par des obstacles artificiels dressés par un Etat membre.
Les priorités naturelles vont reprendre leur chemin, la Commission faire son métier habituel en examinant scrupuleusement les textes de la transposition. La crise, comme celle des ROMS, a l’avantage de montrer quelle est la place réelle de l’Europe et où se trouvent les vraies responsabilités et comment et par qui elles sont assumées. Le président Barroso a clos provisoirement le débat en déclarant à plusieurs reprises : « pour l’Europe, la liberté des médias, le pluralisme de la presse sont un principe sacré, une valeur fondamentale ». Aurait-elle dû ou pu intervenir plus rapidement ? Non elle ne peut s’ingérer dans le processus législatif d’un Etat membre et commenter des projets ou des amendements. La vice-présidente Kroes a fait connaître ses préoccupations dans les vingt-quatre heures suivants l’adoption de la loi. Le cours des évènements est maintenant dicté par le respecter des procédures qui apporte toutes les garanties et sécurité juridique nécessaires au justiciable comme au plaignant ou à la victime. Il faut apporter à la Hongrie une réponse précise aux questions et commentaires qui par la voix de ses responsables font remarquer que la loi n’est pas différente de celles d’autres pays membres et si la loi hongroise doit être modifiée celle des autres pays également : « je défie quiconque de trouver dans notre loi quelque chose qui ne figure pas dans les lois sur les médias des autres Etats membres » a déclaré Viktor Orban. Régulièrement est rappelé l’article 17 de la loi selon lequel « le contenu des médias ne doit pas être offensant ou discriminant, de manière explicite ou implicite, pour les personnes, les nations, les communautés, les nationalités, les ethnies, les langues ou toute minorité ou majorité, de même que les groupes religieux ou les Eglises ». La Hongrie pouvait –elle faire l’économie d’une telle loi, non la loi régissant les médias hongrois devait être changée pour s’adapter aux nouvelles pratiques de certains journaux et chaînes de télévision : « il ya au des atteintes à la dignité humaine et c’est cela que cette nouvelle loi vise à protéger » rapporte un spécialiste de la liberté de la presse qui a contribué à la rédaction de la loi. On ne peut trancher sans un examen approfondi, contradictoire. Il sera nécessairement long sans qu’on doive y voir une tactique dilatoire permettant notamment de repousser les conclusions au-delà de la présidence hongroise. Les impatiences nombreuses à s’exprimer seront-elles apaisées dans les jours qui viennent ? Le Parlement européen vigilant et réactif sur ce dossier a entre ses mains une partie de la réponse : le mardi 11 janvier le groupe libérale organise une audition en présence de Mme Kroes, le 17 janvier la commission des libertés publiques du Parlement européen saisi par le président du groupe socialistes, Martin Schulz, entendra Mme Kroes ; A suivre… donc