La Commission européenne a mis en demeure la Hongrie de démontrer dans un délai de deux semaines que sa loi contestée sur les médias est conforme à la législation européenne, a annoncé vendredi 21 janvier un porte-parole de la Commission. « Je confirme que la Hongrie dispose de deux semaines pour répondre; passé ce délai, nous nous réservons le droit d’entamer une procédure d’infraction », a dit Jonathan Todd, porte parole de Neelie Kroes, vice-pésidente de la Commission et en charge de l’Agenda Numérique et de la société de l’information.
Cet ultimatum, a-t-il ajouté, est précisé dans une lettre adressée aux autorités hongroises. Cet envoi intervient à la fin d’une semaine particulièrement animée : audition de Neelie Kroes par la commission du Parlement européen de libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE), accueil tumultueux du premier ministre Viktor Orban par la plénière du Parlement européen (Cf. informations dans un autre billet). Depuis le premier courrier envoyé par Neelie Kroes aux autorités hongroises, au lendemain de l’adoption de la loi juste avant Noël, cette issue était quasiment programmée de façon inéluctable. Seule la presse toujours prompte à accuser la Commission de pusillanimité, voire de lâcheté, pouvait en douter. Cet envoi qui intervient quarante huit heurs après le passage à Strasbourg de Viktor Orban, confirme la volonté affichée par le président Barroso et par Neelie Kroes de faire vite et de ne pas attendre la fin de la présidence hongroise comme l’en soupçonnaient la majorité des commentateurs. Cet envoi avait été annoncé en début de semaine par le président de la Commission lui-même, José Manuel Barroso.
Entrée en vigueur le 1er janvier, la législation hongroise sur les médias est jugée liberticide par l’opposition et plusieurs capitales européennes. Elle crée une Autorité nationale des médias et des communications (NMHH) qui supervise l’ensemble des médias publics et est habilité à infliger de lourdes amendes aux médias privés, qui sont tenus de publier des informations « équilibrées ». Ce nouvel organisme est contrôlé par des membres du Fidesz, le parti de droite au pouvoir et n’offre aucune garantie d’indépendance. La procédure d’enregistrement est également soupçonnée, elle s’interroge aussi sur le fait que la loi pourrait semble-t-il s’appliquer à des groupes établis hors des frontières hongroises, ce qui contrevient aux règles européennes (les médias ne peuvent répondre que des législations en vigueur dans leur pays d’origine). Bref tout ce qui est contenu dans les interventions publiques de Neelie Kroes (cf. autres informations) est repris dans cette lettre.
« A ce stade, la Commission demande une clarification sur certains points. Nous essaierons de les clarifier dans les plus brefs délais (…) Notre réponse sera prête bien avant ces deux semaines », a réagi Anna Nagy, porte-parole du gouvernement de Viktor Orban.
Face au tollé soulevé, Viktor Orban, ( comme son ministre des affaires étrangères, Janos Martonyi) qui soutient que la loi respecte la liberté de la presse, s’est dit prêt à la modifier si l’UE le réclame, mais a estimé que plusieurs pays européens dont la France et l’Allemagne devraient alors l’imiter.
La formule utilisée par la Commission est curieuse sur le plan juridique, mais acceptable puisque l’on peut considérer come se situant dans une phase pré-contentieuse et donnant une dernière chance à la Hongrie de s’expliquer, de donner une preuve de sa bonne foi et de son intention de modifier les dispositions en infraction par rapport à la Directive elle-même et, pour l’instant, on s’en tient à ce périmètre ainsi défini. La pointe de l’iceberg d’un vaste dossier où chaque Etat membre doit de sentir directement concerné pour son propre compte