La loi qui prendra effet le 11 avril a été publiée le jeudi 3 mars au Journal Officiel. Dés le lendemain, une campagne d’affichage, des dépliants et un site internet sont mis à disposition du public pour expliquer la loi. La circulaire précisant les conditions de mise en oeuvre de la loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public, et donc le port du voile intégral (niqab, burqa…), a été publiée plus d’un mois avant son entrée en vigueur. La Loi entend, selon François Fillon, « réaffirmer solennellement les valeurs de la République et les exigences du vivre ensemble », comme le précise la circulaire signée par le Premier ministre. Le texte se veut un texte d’apaisement qui donne une chance à l’apaisement. La circulaire définit la notion d’espace public (voie publique, lieux ouverts au public ou affectés à un service public. Elle rappelle les sanctions (150 euros d’amende et stage de citoyenneté), la conduite à tenir (appeler les forces de l’ordre qui dresseront un procès-verbal si la personne refuse de se découvrir) .
Après des mois de houleux débats, dont Nea Say a rendu compte dans le détail y compris dans son volet européen, débats initiés par la demande d’André Gerin, député PCF de Vénissieux (Rhône) d’une commission d’enquête parlementaire en juin 2009, elle proscrit le port du niqab et de la burqa pour les femmes musulmanes. « Se dissimuler le visage place les personnes concernées dans une situation d’exclusion et d’infériorité incompatible avec les principes de liberté, d’égalité et de dignité humaine affirmés par la République française », souligne la circulaire. Celle-ci s’accompagne d’une campagne d’affiches, format papier, portant le slogan « La République se vit à visage découvert », et qui seront apposées dans les lieux ouverts au public ou affectés à un service.
Des dépliants en français et un site internet (www.visage-decouvert.gouv.fr) seront aussi mis, le même jour, à la disposition des personnes intéressées. Une version en anglais et en arabe sera disponible dans les postes consulaires français à l’étranger, pour les voyageurs souhaitant se rendre en France.
Selon la loi, « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ». Par espace public, on entend les voies publiques, les transports en commun, les commerces et centres commerciaux, les établissements scolaires, bureaux de poste, hôpitaux, tribunaux, administration, plages, jardins, cinémas, gares, banques, commerce….S’y ajoutent les lieux de culte alors que le Conseil constitutionnel avait estimé qu’il pouvait s’agir d’une violation de la liberté religieuse, mais pas les voitures particulières qui sont considérées comme des espaces privées Sont notamment interdits le port de cagoules, de voiles intégraux (burqa, niqab…), de masques ou de tout autre accessoire ou vêtement rendant impossible l’identification de la personne. Quelques exceptions sont prévues dans le cadre de pratiques sportives, ou manifestations festives. La loi prévoit une amende allant jusqu’à 150 euros et/ou un « stage de citoyenneté » pour les personnes qui l’enfreindront. Par ailleurs, toute personne obligeant une femme à se voiler sera passible d’un an de prison et de 30.000 euros d’amende. La peine sera doublée (deux ans de prison, 60.000 euros d’amende), si la personne contrainte est mineure.
Les autorités françaises ont répété que le premier souci est de ne pas stigmatiser et l’on souligne les premières phrases de la loi qui s’efforce de rappeler le sens de la loi : « se dissimuler le visage c’est porter atteinte aux exigences minimales de la vie en société (…) la République se vit à visage découvert». Cette dernière formule sera le slogan de la campagne, une campagne qui se veut surtout destinée à l’information du public, mais surtout des professionnels confrontés à des situations en public et face au public. Il était prévu que l’entrée en vigueur de la loi devait être précédée d’une période de six mois après la promulgation de la loi pendant laquelle devaient être menées des actions de médiation et de pédagogie. Or il n’y en a eu peu ou pas et l’on a fait remarquer que précisément des discussions de quartier c’était précisément ce qu’il fallait éviter et lancer des opérations médiatiques c’était nourrit un débat déjà assez artificiel, le relancer et qu’il fallait donc choisir l’apaisement sans renoncer à convaincre les femmes qui voudraient porter le voile intégral et amener la toute petite minorité qui dissimule son visage à respecter l’interdiction .
La question qui reste posée est de savoir si la coïncidence de dates avec le projet , plus ou moins avorté, avec le projet de débat voulu par Sarkozy, ne risque pas de crisper des attitudes en voie d’apaisement. Un débat sur l’Islam et la laïcité est-il encore utile. ? A première vue non ! La loi de 2004 sur le port du foulard est à cet égard illustrative: la loi a posé des limites et son respect quasi instantané et général a démontré l’attachement des musulmans français à la légalité républicaine. Les violences des banlieues de 2005 ont rappelé que les véritables défis étaient sociaux et pas religieux. La forte diminution, pour ne pas dire disparition, des alertes terroristes fait mentir les scénarios apocalyptiques du choc des civilisations à l’intérieur même de la France. Ces prévisions sont aussi largement contredites par les manifestations du « printemps arabe » qui demandent plus de démocratie, de justice et d’équité sociale et rien que cela. Un nouveau débat est malvenu et pire il se situe en porte-à-faux avec l’actualité, avec la réalité d’aujourd’hui. Le musulman typique ressemble de plus en plus depuis une quinzaine d’années avec la classe moyenne : une dynamique s’est créée mais si elle est inégale et encore trop lente. Ce débat est dépassé : hier il pouvait se justifier, aujourd’hui il risque de détruire les succés obtenus dans l’intégration dans les dix à quinze dernières années.
-. Texte de la circulaire du 3 mars 2011 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=?cidTexte=JORFTEXT000023654701&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id
-. Texte de la loi du 11 octobre 2010 http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000022911670&categorieLien=id