La barque devient un peu plus chargée chaque jour, après le rebondissement dans l’affaire Swift (cf. autre information) et après les déclarations des autorités européennes de la Commission selon lesquelles : « avec les Etats-Unis, tout va très bien …
Un tribunal américain a demandé au service de microblgging Twitter de lui fournir des données personnelles et des messages liés à des citoyens européens accusés d’être partie prenante dans l’affaire WikiLeaks. Cela est-il une violation des lois européennes en matière de protection des données ? Les députés en ont débattu mercredi 23 mars.
En janvier dernier, Twitter a rendu publique une demande de la justice américaine l’enjoignant à lui transmettre des données personnelles de personnes soupçonnées d’avoir eu des liens avec WikiLeaks. Cela pourrait également contenir les noms des quelque 800 000 utilisateurs de Twitter qui suivent WikiLeaks sur cette plateforme.
Un groupe de députés européens s’inquiètent de ce que cela pourrait violer les lois européennes en matière de protection des données. Lors d’un débat avec les représentants de la Commission et du Conseil, de nombreux intervenants ont souligné la nécessité de s’en tenir à la loi et, si besoin, de renforcer la protection des données des citoyens face à ce genre d’intrusion. Au nom du Conseil (représentant les Etats membres), la Hongroise Enikő Győri a affirmé qu’il n’y avait pas de preuve que la justice américaine ait violé les lois européennes. « Il appartient aux autorités nationales de protéger les données de leurs citoyens », a-t-elle précisé. C’est une déclaration réductrice bien curieuse et qu’en pense le Parlement européen ? En tout cas une déclaration qui aurait mérité d’être plus nuancée. La commissaire Viviane Reding a suivi la même ligne. Elle estime que la Commission n’est pas compétente pour traiter de ce sujet. « Quand on utilise Twitter, on souscrit à la politique de protection de la vie privée proposée par Twitter ». Pour elle, la législation européenne en matière de protection des données ne s’applique pas aux enquêtes criminelles. Ce point sera sans douté précisé lors de la refonte de la directive de 1995.
Un certain nombre de députés appartenant à quasiment tous les groupes politiques( toujours les mêmes) sont bien décidés à protéger les citoyens avant tout. Pour l’Allemand Axel Voss (Parti populaire), il faut respecter la législation américaine. Néanmoins, il appelle à une amélioration de la protection des données en Europe et à la mise en place d’accords transatlantiques plus complets. Le Britannique Claude Moraes (Socialistes et démocrates) s’inquiète de ce que les innocents internautes européens deviennent des cibles pour la justice américaine. Il aimerait que la protection des données soit étendue aux domaines judiciaire et policier. « Bien que les entreprises dont nous parlons soient basées aux Etats-Unis dans leur grande majorité, beaucoup d’utilisateurs sont ici en Europe », a rappelé la libérale néerlandaise Sophie in’t Veld. Elle critique le fait que les tribunaux américains considèrent toute ouverture d’un compte sur Twitter comme un renoncement à la protection de la vie privée. « Il faut que les citoyens aient confiance dans la capacité de la loi à les protéger, défend le Vert Jan Philipp Albrecht, notamment sur internet ou quand les droits civils sont attaqués ». Enfin, le Néerlandais Daniël van der Stoep (non-inscrit) a fait entendre un son différent et isolé: « Le respect de la vie privée a aussi ses limites. Il doit être garanti autant que possible mais il ne peut être plus important que la lutte contre le terrorisme ».
La rencontre récente de Mme Reding avec les autorités américaines du département du Commerce semble donner une autre tonalité ! Qui croire ? D’un côté la Commission va bientôt faire ses propositions de révision de la directive de 1995 (cf Nea say) où la commissaire a fait sien le droit à l’oubli et la possibilité de retirer ses données, notamment sur les réseaux sociaux. De son côté les Etats-Unis se préparent à voter une charte du droit à la confidentialité. Pour la première fois les Etats-Unis semblent s’avancer vers une base légale pour construire un socle légal de principes garantissant la protection des données des consommateurs, en vue de préserver leur confiance. Ces garanties concerneraient le droit d’accès des consommateurs à leurs données, la possibilité d’en limiter l’utilisation ou encore le droit à l’oubli. Est-ce suffisant pour provoquer des déclarations de Mme Reding pour se féliciter d’une certaine convergence des approches réciproques ?