Bruxelles veut une stratégie sur l’intégration des Roms. La Commission européenne exhorte les Vingt-Sept à lui rendre des comptes et à agir davantage pour intégrer les Roms. Le conflit avec la France de l’été dernier a permis de réveiller l’Europe. Tout le monde a repris conscience du fait que les citoyens européens ont des droits et que ces droits doivent être appliqués . Une tâche de longue haleine qui ne produira pas immédiatement des résultats, à commencer pour des pays comme la Roumanie, la Bulgarie ou la Hongrie. La priorité des priorités la scolarisation des enfants : qu’ils achèvent au moins l’école primaire. Que se passera-t-il si les objectifs ne sont pas atteints ? Le véritable enjeu la stratégie de croissance de l’UE et sa stratégie 2020. Elle se vaut intelligente, durable et inclusive , pour tous, Roms ou pas Roms. Elle ne peut pas réussir en laissant perdurer la marginalisation économique et sociale de la plus importante minorité européenne. Mais que se passera-t-il si les objectifs ne sont pas atteints ? Des sanctions ? Des rapports annuels ! Pour assurer une véritable évolution sur le terrain, la Commission veut mettre en place un mécanisme de contrôle solide. L’Agence européenne des droits fondamentaux (FRA)aura un rôle clé à jouer en collectant les données sur la situation économique et sociale en collaboration avec d’autres organisations.
Intégrer les Roms , c’est aussi un bon calcul économique : selon la Banque mondiale, bien les intégrer au marché du travail améliorerait à hauteur d’environ deux milliards les fiances de pays comme la Roumanie ou la République Tchèque comme le rapporte l’aide-mémoire sur le sujet de la Commission européenne .
Que peut faire l’Union européenne ? La Commission européenne a présenté, mardi 5 avril, une analyse de la situation des 10 à 12 millions de Roms dans l’Union. Les différences sont criantes avec le reste de la population. Exemple : 97,5 % des enfants finissent l’école primaire, mais seuls 42 % des enfants roms y sont parvenus en Bulgarie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Roumanie et Slovaquie en 2008. Sur le marché de l’emploi, 68,8 % des 20-64 ans travaillent, mais les Roms se situent environ 26 % en dessous de ce chiffre en Bulgarie, République tchèque, Roumanie…Les politiques d’intégration sont nationales. Aussi le cadre proposé, mardi 5 avril, par la Commission « ne remplace pas la responsabilité première des États membres », mais les « incite à adopter ou à développer une approche globale de l’intégration des Roms ».
Selon quatre priorités : accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé, au logement et aux services de base (eau, électricité, gaz), que les populations soient sédentaires ou non. Les pays européens sont tenus de ne discriminer personne par une directive de 2000. Mais ce texte ne suffit visiblement pas.
Que change l’initiative de Bruxelles ? C’est la première fois que la Commission réclame des comptes précis aux Vingt-Sept. Elle les invite tous « à préparer ou à réviser leurs stratégies nationales » et à les lui présenter « d’ici à la fin décembre 2011 ». Elle les évaluera ensuite dans un rapport prévu au printemps 2012.
Après les expulsions de Roms par la France l’été 2010, les experts de la Commission ont noté que les États n’apportaient pas à Bruxelles d’informations spécifiques sur les dépenses de fonds européens pour les Roms. Pire ces fonds sont très largement inutilisés. Carences des administrations nationales, mais aussi de la société civile auxquelles s’ajoute l’insuffisante mobilisation des Roms eux-mêmes.
Pourtant 9,6 milliards d’euros sont disponibles pour des projets d’intégration des personnes défavorisées, et 172 millions d’euros ont été spécifiquement réservés aux Roms. Certains États ont des problèmes de cofinancement, nécessaire pour accéder aux fonds européens, de mise en œuvre, ou encore des difficultés administratives, mais surtout un manque de volonté politique. « Des difficultés prégnantes en Roumanie et Bulgarie mais que l’on retrouve dans tous les pays européens, et notamment en France, pays qui a choisi de ne consacrer qu’un million d’euros aux Roms sur la période 2007-2013 sur les 4,5 milliards qu’il obtient au titre du Fonds social européen (FSE), soit une infime partie (0,025 %) », dénoncent deux eurodéputés français, Nathalie Griesbeck et Jean-Luc Bennahmias.
Pour changer la donne, la Commission propose aussi que chaque État membre désigne une personne de contact pour l’aider à coordonner la nouvelle stratégie. Est-ce à la hauteur des problèmes ?Alors que l’on assiste à de violentes manifestations , quasi progroms, anti-Roms en Hongrie de la part du parti d’extrême droite Jobbik comme le 2 avril à Hejogyospata qui pour regagner le terrain perdu dans les urnes (mais 17% des voix aux élections législatives) se lance dans une surenchère xénophobe et réactive la question des Roms.C’est désormais courant en Hongrie depuis le retour d’Orban et du jobbik, les répressions anti-roms sont monnaie courante.
Mme Reding lors de la session plénière du Parlement européen a présenté la communication qui venait tout juste d’être adoptée (5 avril). Doit-on dire comme le proclame le communiqué de presse du Parlement européen que les députés se sont félicités du contenu de la communication? Certes c’est un progrès par rapport au passé, mais beaucoup de députés ont été critiques et dénoncé un manque d’ambition et plus même.
La Commission a manqué d’ambition, elle n’a pas traité des questions comme les droits fondamentaux, la non-discrimination, la libre circulation dans toute l’UE ou encore la lutte contre le sentiment de xénophobie à l’encontre des Roms. Absence également dans cette nouvelle stratégie de la dimension du genre, la non consultation des Roms et des ONG lors de l’élaboration de la stratégie ou absences de sanctions claires en cas de non respect. La Commission devrait avoir une approche plus hardie vis-à-vis des attentes. Au nom des Verts, la française Hélène Flautre a mis en évidence des faiblesses : aucune mention n’est faite de la nécessaire participation des Roms à tous les niveaux : élaboration, mise en œuvre, évaluation des projets. Il aurait été important pour la députée qu’il y ait eu des développements spécifiquement consacrés à la lutte contre les discriminations, les violences, l’accès à la justice. Pour Cornelia Ernst (GUE/NGL, allemande le plan d’ensemble ne serait qu’une coquille vide !
Pour la présidence, la ministre Enikö Györi elle entend présenter la nouvelle stratégie à la Plateforme des Roms à Budapest le 7 et 8 avril, puis au Conseil JAI du 12 avril, puis le 19 mai au Conseil affaires sociales (EPSCO), le 20 mai au Conseil Education, puis au Conseil affaires sociales le 23 mai. L’adoption par le Conseil européen de juin ne constituera qu’un nouveau départ pour une action coordonnée au niveau européen pour aider « une minorité véritablement européenne » selon les mots de conclusion de la ministre.
Pour en savoir plus
-.EU framework for national Roma strategies : Frequently asked questions http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=MEMO/11/216&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=fr
-. Communication de la Commission: cadre de l’UE pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’en 2020 (FR) http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=518&langId=fr
(EN) http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=518&langId=fr
-. Site de la commission européenne : l’Union européenne et les Roms (FR) http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=518&langId=fr
(EN) http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=518&langId=en