La lutte anti mafia à l’ordre du jour au Parlement européen. La mafia un phénomène unique en Europe

A deux reprises, dans un intervalle de temps relativement bref (29-30 mars et 12 avril) les députés européens entourés de nombreux experts, policiers et magistrats se sont penchés sur un problème dont Europol vient de souligner la gravité croissante. La mafia grandit mais elle est aussi en pleine mutation ce qui rend encore plus complexe et plus urgente la lutte qu’il faut mener contre elle. Tout d’abord c’est à  Bruxelles, les 29-30 Mars s’que s’est est déroulée une audition intitulée «Vers une stratégie commune de l’Union européenne pour lutter contre la criminalité transnationale organisée ». L’audition, organisée par Sonia Alfano députée italienne (ALDE), a été un important moment de discussion et de débat en vue de préparer le rapport du Parlement européen sur la criminalité organisée dans l’UE, (rapporteur Sonia  Alfano). Le but de l’audition : identifier les meilleures propositions pour une lutte efficace contre la criminalité transnationale organisée, en particulier la mafia.

1-. L’audition a été suivie par cinquante avocats de 18 Directions antimafia qui ont discuté, avec les procureurs de différents pays et des représentants au niveau le plus élevé. Assistaient également  les chefs d’Interpol ( Pierre Reuland) Europol (Troels Oerting) Eurojust (Aled Williams) Cour des comptes européenne (Loannis Sarmas) UNODC (Pierre Lapaque) BEI (Jan Willem van der Kaaij) Cecilia Malmstrom commissaire de l’Intérieur et la présidence de la Hongrie (Péter Stauber).

Deux journées intenses au cours desquelles il y a eu plusieurs occasions pour souligner que le problème a été largement sous-estimé par les forces politiques: le Procureur de Palerme Antonio Ingroia, a souligné la nécessité d’une coordination sous la direction d’un procureur européen, par exemple. Il  a souligné que «des années de sous-estimation ont fait devenir la mafia ce qu’elle est aujourd’hui. Il n y a pas eu une volonté politique suffisante des gouvernements pour  résoudre le problème or seule l’Europe peut agir « . Le procureur Antonio Di Matteo, a souligné la capacité de la mafia pour  s’infiltrer dans le système politique et l’administration publique, insistant sur le fait que l’éthique politique et les jugements moraux ne peuvent pas attendre . Le fardeau économique de la criminalité organisée en matière notamment de transactions financières internationalesa été soulignée par Scarpinato (Procureur général de Caltanissetta) dans une analyse du phénomène extraordinaire:« La mafia s’est adaptée à la demande du système et c’est la réponse typique à la mondialisation. Il n’y aura pas de marché en Europe si nous ne combattons pas la «mafia». Selon le procureur de Reggio Calabria , Nicola Gratteri , »Les États membres n’ont pas la perception de l’omniprésence de la mafia en Europe», et il est donc nécessaire d’établir « une législation européenne uniforme» et serait important à faire des enquêtes sur le crime organisé, sans passer par la commission rogatoire. Eurojust ne garantit pas le droit de la coopération judiciaire « . Du même avis est l’organisateur et rapporteur de l’audition Sonia Alfano, qui a également souligné ,à plusieurs reprises, la nécessité de reconnaître dans tous les États membres le crime d’association mafieuse, qui n’existent actuellement que seulement en Italie. Tous les orateurs ont partagé et soutenu le contenu du rapport de la députée Sonia Alfano, en stimulant ses propositions et en soulignant la nécessité pour tous de parler le même langage, au niveau européen.

Au cours de l’audition, certains membres de différentes nationalités ont souligné l’originalité et l’unicité d’un événement historique comme celui de la mafia et ils ont demandé au rapporteur et aux juges de ne pas s’arrêter à cette audition mais de commencer à organiser dans tous les Etats des événements de la même importance avec comme  but celui de sensibiliser sur la question les gouvernements.

Le problème, plusieurs fois souligné, est que pour  lutter contre le crime organisé, il est  nécessaire de porter toute l’attention sur  la finance. En ce sens, le Parlement européen doit insister avec les États membres pour qu’ils fassent preuve d’ une volonté plus sérieuse et plus déterminée dans la lutte contre le blanchiment d’argent, un des canaux les plus insidieux de la contamination entre l’économie légale et illégale.

La question de l’utilisation des fonds européens et en général des fonds publics contre le crime organisé est une question qui reste toujours ouverte. Il existe plusieurs mesures, à la fois la lutte préventive et répressive, qui peuvent être prises au niveau national et européen afin de garantir que les ressources publiques ne se retrouvent pas dans les poches des organisations criminelles.

Le crime organisé représente le plus grand obstacle à la création d’un espace commun de liberté, de sécurité et de justice dans l’Union européenne.

Le rôle de la politique ne doit pas consister  à inventer des solutions créatives, mais plutôt d’apprendre à écouter et à synthétiser, en gardant à l’esprit comme un point de référence unique, l’intérêt collectif et le public.

2-. Le 12 avril l’eurodeputée Sonia  Alfano (ALDE) a présenté son projet de rapport à la commission LIBE du Parlement européen et elle a déclaré- « Je suis très heureuse de la réaction de la commission LIBE à la présentation du projet de résolution du Parlement européen sur la criminalité organisée dans l’UE. Le fait que ma proposition, de consultation avec les institutions, le pouvoir judiciaire,  des centres de recherche et des ONG, a été soutenu de manière décisive par la Commission européenne, le Conseil et par les groupes politiques au Parlement européen est un excellent point de départ « . Dans son exposé Sonia Alfano a été soutenue par le Procureur D’Alterio qui a déclaré que la menace du crime organisé est très forte (en 2000, 180 conseils municipaux ont été dissous pour infiltration mafieuse) ; la mafia s’est internationalisée. Le massacre de Duisburg a démontré le danger à la fois en Europe et dans le monde. Aujourd’hui, la mafia a une structure divisée en domaines de compétence. La ‘Ndrangheta a été encore renforcée par l’élimination des liens familiaux et de l’expansion  à d’autres régions italiennes. Malgré ces changements, les objectifs de la criminalité organisée n’ont pas changé: pénétrer la société civile et encourager les agents publics ne pas faire leur devoir.

Le procureur identifie ensuite quelques actions mettre en oeuvre dans la lutte contre la mafia, en Italie en particulier, on devrait renforcer le système pénitentiaire, développer un système de surveillance régulier des flux financiers, assurer la sécurité maximale dans la protection des témoins.

Les dommages que le crime organisé a causés en  l’Europe sont très graves (parmi les tendances les plus sérieuses il y a le blanchiment d’entrée affectant les marchés publics), l’Europe a besoin d’un soutien plus important des pays membres en termes de ponctualité et rapidité, en particulier à travers l’intégration des  juridictions.

Enfin Sonia Alfano a ajouté : l’Union européenne représente  l’ouverture d’un front dans la lutte contre la criminalité organisée  et prend en compte les différentes caractéristiques d’une menace criminelle qui comme  celle de la mafia,  nous le savons, ne concerne pas seulement l’Italie. Bien sûr, – dit-elle – cette présentation est une première étape cruciale. Maintenant, nous allons travailler pour améliorer la rédaction du rapport et faire la synthèse des contributions et des amendements  des autres groupes, mais étant donné les réactions d’aujourd’hui, a-t-elle conclu, « je suis convaincue que le Parlement européen sera en mesure d’approuver une résolution en Juillet, une résolution  ambitieuse et politiquement forte  »

La criminalité de type mafieux exploite la mondialisation à son avantage, tout comme elle a su, la première, tirer partie de la suppression des frontières au sein de l’UE et elle a su se créer un filet de consensus et de soutien précisément en mettant à profit cette nouvelle situation. En contrepartie, le traité de Lisbonne ouvre de nouvelles possibilités et de nouveaux instruments et il convient désormais d’approfondir les politiques relevant de la compétence de l’Union. Un petit nombre d’axes prioritaires doivent être recherchés et parmi ceux-ci :

      -. Améliorer la cadre législatif de l’Union européenne ;

      – . Lutter contre le profond enracinement de la criminalité organisée de type mafieux au sein de l’Union ;

      -. Améliorer l’efficacité des structures européennes engagées à divers titres dans la lutte contre la criminalité organisée et renforcer les relations avec les autres institutions internationales ;

      -. Promouvoir une culture de la légalité ;

      -. Développer la transparence du secteur public ;

      -. Prévoir des conditions de détentions plus sévères ;

     -. Interdire aux  condamnés de se présenter à des élections quel qu’en soit le niveau ;

      -. Assurer une défense pénale  implacable de l’environnement ;

      -. Lancer un message fort sur le plan international  pour lutter contre le blanchiment d’argent.

 A suivre….vote en commission puis en plénière à l’automne

Projet de rapport (FR) http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2009_2014/documents/libe/pr/862/862645/862645fr.pdf

 (EN) http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2009_2014/documents/libe/pr/862/862645/862645en.pdf

 

Alessandra Massaro

Denisa Mucaj

Carmela De Luca

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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