Les médias européens contribuent pour beaucoup à la xenophobie aux stéréotypes antitsiganes. Commissaire aux droits de l’homme, leur lance un appel . mais les hommes politiques ne doivent pas être oubliés. Les décisions des chefs deEtat et de gouvernement ne semblent pas avoir de prise sur eux.http://www.coe.int/lportal/web/coe-portal/press/newsroom?p_p_id=newsroom&_newsroom_articleId=576630&_newsroom_groupId=10226&_newsroom_tabs=newsroom-topnews&pager.offset=0
Après le Conseil européen des 23 et 24 juin qu’attendre des engagements pris par les chefs d’Etat et de gouvernement ?
Le rapport de la présidence hongroise présente une synthèse des différentes discussions sur la question de l’intégration des ROMS qui ont eu lieu dans plusieurs formations du Conseil ( Justice et affaires intérieures du 12 avril, Emploi/ Politiques sociales du 19 mai, Education Jeunesse du 20 mai). Le Conseil européen relève plus particulièrement qu’il revient au premier chef aux Etats membres de concevoir des politique visant à faire progresser l’intégration sociale et économique des Roms.
Les actions menées au niveau de l’UE devraient tenir compte de la diversité des contextes nationaux et respecter le principe de subsidiarité. Faire progresser l’intégration des Roms est également une préoccupation commune des Etats membres et dans leur intérêt .La coopération sur ces questions au niveau de l’UE apporte une réelle valeur ajoutée en améliorant la compétitivité, la productivité et la croissance économique ainsi que la cohésion sociale.
Le Conseil ajoute encore que les aspects territoriaux devraient servir de base principales pour la conception des politiques d’intégration des Roms en matière d’éducation, d’emploi, de logement, de soins de santé conformément au principe commun central dit « ciblage spécifique mais sans exclusivité » compte tenu de l’importance que revête la question des droits fondamentaux.
Le Conseil appelle également les Etats membres à veiller à ce que l’égalité d’accès à l’enseignement,à l’emploi, aux soins de santé et au logement se concrétise pour combler les écarts entre les communautés roms marginalisées et le reste de la population, surtout les femmes.
Il invite aussila Commission à poursuivre les travaux dela Task force sur les roms de manière à inscrire l’intégration des roms dans l’ensembles des politiques de l’UE et à évaluer le rôle que jouent les fonds de l’UE dans les efforts déployer pour faire progresser leur intégration dans l’UE ainsi que dans le cadre de la politique de l’élargissement..
Enfin le Conseil invitela Commissionet les Etats membres, en étroite coopération et conformément à leurs compétences respectives, à faire progresser l’intégration sociale et économique des Roms en garantissant leurs droits juridiques, etre autres ceux des Roms victimes de la traite d’êtres humains, ou encore à favoriser les changements positifs d’attitude à l’égard des Roms en améliorant la sensibilisation à leur culture et à l’identité Rom, en combattant les stéréotypes, la xénophobie, le racisme.
Les stéréotypes anti-tsiganes perdurent et continuent de se répandre dans un certain nombre de médias en Europe. Les médias ont un rôle important à jouer dans la lutte contre les préjugés mais, s’agissant des Roms et des Gens du voyage, certains journaux et médias de radiodiffusion n’assument toujours pas leurs responsabilités et nourrissent la xénophobie à coups de reportages tendancieux et de sensationnalisme au rabais, a dit Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe en publiant aujourd’hui son dernier article du Carnet des droits de l’homme. Il est temps de promouvoir un journalisme éthique et des codes de déontologie afin de rompre avec l’image largement négative des Roms que véhiculent les médias.
Le niveau de sensibilisation à la culture rom et aux défis auxquels les Roms, qui représentent la minorité ethnique la plus importante d’Europe, doivent faire face dans les sociétés européennes est malheureusement limité. De nombreux Roms vivent dans des conditions de marginalisation extrême , souvent victimes de racisme et de discrimination. Ils ne sont pratiquement pas représentés dans la sphère politique. Le fait que les Roms et les Gens du Voyage disposent des mêmes droits de l’homme que tout un chacun est souvent oublié.
L’anti-tsiganisme est exploité par des groupes extrémistes dans plusieurs pays européens, une tendance dangereuse à laquelle les médias contribuent et dont les conséquences peuvent être dramatiques. Ainsi, en Hongrie, entre 2008 et 2009, six Roms dont un enfant de cinq ans ont été assassinés de sang froid dans un climat de vives tensions attisées par les discours de haine.
La rhétorique anti-rom en Europe :même si le travail médiatique ne diffuse pas de discours de haine à proprement parler, il peut contribuer à véhiculer des stéréotypes, par exemple en ne mentionant les Roms et les Gens du Voyage que dans des reportages sur les problèmes sociaux et le crime, ou en faisant la promotion de préjugés comme celui laissant penser que les Roms vivent perpétuellement en marge de la loi, ou qu’ils sont responsables de leur propre exclusion parce qu’ils ont choisi d’être différents.Un suivi systématique des médias roumains révèle qu’ils sont souvent à l’origine de cette chasse aux sorcières à l’encontre des Roms. De même, en Bulgarie, des articles haineux ont été publiés, comparant les Roms à du « bétail », à des « moutons », et des « loups ». Un troisième exemple provient d’Italie, où de virulents discours et des stéréotypes négatifs à l’encontre des Roms, ont été la toile de fond de la multiplication des évictions et expulsions de ces dernières années et ont encouragé la population à accepter cet état de fait.
Ethique et codes de déontologie pour les médias : selon un principe éthique fondamental, on ne saurait incriminer tout un groupe pour les agissements éventuels de quelques-uns de ses membres. La stigmatisation généralisée de l’ensemble des Roms – dont la grande majorité n’est pas en conflit avec la loi – montre qu’il y a un grand besoin d’autorégulation et de journalisme éthique. La formation des journalistes, comme celle qui a été organisée dans le cadre de la campagne Dosta ! lancée par le Conseil de l’Europe, peut aider à améliorer le travail journalistique.Il existe plusieurs médias s’adressant à la communauté rom et des réseaux permettant aux journalistes roms de se prendre mutuellement en main, mais peu de Roms sont employés ou consultés par les médias majoritaires, d’où une méconnaissance de leur point de vue par l’ensemble de la population. Grâce aux projets de jumelage dela Commission européenne, davantage de journalistes roms peuvent se faire une place dans les médias majoritaires, et les journalistes non-roms peuvent nouer des contacts avec les communautés roms de manière à être mieux armés pour trouver des explications et des solutions et ne pas se limiter aux problèmes.
La marche à suivre : les médias ont une grande influence sur notre perception du monde, ce qui implique pour eux une grande responsabilité qu’ils négligent trop souvent.La diffusion de préjugés sur les Roms et les Gens du Voyage contribue à leur exclusion sociale et devient un obstacle majeur à l’exercice de leurs droits fondamentaux. Bien que les journalistes et rédacteurs n’aient pas à se faire les porte-parole d’intérêts individuels, ils peuvent, par un véritable professionnalisme, participer à l’avènement d’une société plus équitable.
Les responsables politiques qui tiennent des propos anti-Roms alimentent la haine : appel de Thomas Hammarberg. Un exemple Milan : discrimination xénophobie violence
« Des affiches placardées à Milan pendant la récente campagne électorale pour les municipales agitaient la menace selon laquelle la ville était en passe de devenir une « ville tsigane ». Bien qu’il s’agisse là d’une manifestation extrême de xénophobie, les propos anti-Roms sont en fait chose courante dans la bouche de responsables politiques de plusieurs pays d’Europe. Si cela ne cesse pas, tous les efforts faits pour promouvoir l’intégration des Roms dans la société seront voués à l’échec, et la discrimination et la violence continueront d’être le quotidien de nombreux Roms.
Les dirigeants politiques ont une responsabilité toute particulière pour lutter contre la discrimination et créer des liens entre les différents pans de la société. Ils devraient éviter d’utiliser des propos stigmatisants à l’égard des Roms et ne pas alimenter les préjugés anciens contre cette minorité. On en a vu un exemple malheureux l’été dernier lorsque des citoyens roms de l’Union européenne ont été expulsés de France, et qu’on a entendu à cette occasion de hauts responsables proférer des généralisations à l’emporte-pièce sur les Roms et les Gens du voyage, en insistant particulièrement sur leur implication dans des actes criminels.
On lit parfois aussi des commentaires racistes dans des documents officiels émanant de responsables publics. Dans une lettre publiée en novembre 2010 sur le site web de la commune de Nový Bydžov en République Tchèque, le maire tenait les Roms pour collectivement responsables du viol d’une jeune fille et annonçait une série de mesures répressives contre la communauté rom locale.
Les conséquences vont Au-delà des mots : les conséquences de la rhétorique anti-rom de hauts responsables ne sauraient être sous-estimées. Leurs propos peuvent être compris comme un encouragement à commettre des actes violents contre les Roms, comme la violence collective et les pogroms. Après les déclarations publiques du maire de Nový Bydžov, des groupes néonazis ont agressé des Roms lors d’une manifestation organisée en mars 2011.
Autre exemple, cette fois en Hongrie : les commentaires du maire de Tiszasarion sur ce qu’il appelle « la criminalité tsigane » ont débouché sur la création d’une « gendarmerie » spéciale. De tels groupes d’auto-défense sont déjà à l’œuvre dans d’autres endroits en Hongrie. Ils s’apparentent d’une certaine manière aux gendarmes qui opéraient contre les Juifs dans ce pays pendant la deuxième guerre mondiale.
Contre le cercle vicieux des préjugés et de l’exclusion, des dirigeants responsables !
Notre expérience nous a appris que le discours politique anti-rom perpétue l’antitsiganisme. En donnant à la société l’exemple des préjugés et de la discrimination, les responsables politiques empêchent effectivement les Roms et les Gens du voyage d’exercer leurs droits au même titre que les autres citoyens. Lorsque l’Italie a proclamé en 2008 son intention de renvoyer de force des Roms roumains dans leur pays, le ministre roumain des Affaires étrangères de l’époque a déclaré qu’il envisageait « d’acheter un terrain dans le désert égyptien pour y envoyer toutes les personnes qui ternissent l’image du pays ». Dans un contexte aussi hostile, tous les efforts accomplis par les communautés roms pour sortir de leur marginalité et établir des relations positives avec le reste de la population ne peuvent que rester vains.
Les responsables publics, y compris les dirigeants politiques et leaders d’opinion, ne sont pas au-dessus des lois. Les propos anti-Roms, notamment pendant les campagnes électorales, doivent toujours être vivement condamnés, et sanctionnés lorsqu’ils violent les lois contre l’incitation à la haine.Les responsables politiques doivent être conscients des graves conséquences que peuvent avoir leurs propos. Les partis politiques devraient adopter des mesures d’autorégulation pour exclure tout langage raciste.
En vertu d’un principe général des droits de l’homme, les généralisations et la stigmatisation de groupes tout entiers sont à éviter. Dans le cas des Roms, ce principe vaut d’autant plus qu’ils sont la cible de préjugés profondément enracinés, qui ont engendré une répression parmi les plus implacables de toute l’histoire européenne. C’est jouer avec le feu que de ranimer les vieux stéréotypes à l’égard des Roms. Les responsables publics devraient au contraire contribuer à mieux faire connaître l’histoire et la culture roms à l’ensemble de la population.
Le Pape Benoît XVI a donné l’exemple en juin 2011 lorsqu’il a accueilli deux mille Roms européens au Vatican en leur disant : « Votre peuple ne doit plus jamais être la cible d’abus, de rejet ou de mépris ». Espérons que tous les responsables politiques en Italie et ailleurs aient entendu le message. »
Thomas Hammarberg
Signalons quela Commissioneuropéenne et le Conseil de l’Europe ont renforcé leur action en faveur des Roms en signant un accord sur les médiateurs qui lance un programme de formation des médiateurs roms.
-. L’inclusion des Roms: une nécessité, un défi, un devoir Séminaire de dialogue organisé le 27 juin par la Commission des conférences épiscopales de l’UE (COMECE) http://www.comece.eu/europeinfos/fr/archives/numro140/article/4049.html
-. Cadre de l’UE pour les stratégies nationales d’intégration des Roms (2011-2020) Com 173 final du 5.4.2011 (FR) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2011:0173:FIN:FR:PDF
(EN) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2011:0173:FIN:EN:PDF
-. Communiqué de presse du Conseil affaires sociales du 19 mai http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/lsa/122116.pdf
-. Intégration des Roms : rapport de la présidence du Conseil (FR) http://register.consilium.europa.eu/pdf/fr/11/st10/st10665.fr11.pdf
(EN) http://register.consilium.europa.eu/pdf/en/11/st10/st10665.en11.pdf
-. Carnets des droits de l’Homme de Thomas Hammarberg http://commissioner.cws.coe.int/tiki-view_blog_post.php?postId=152