Peine de mort : chaque année le 10 octobre revient avec son rituel de déclarations et de condamnations. Utile ? Certainement !

A terme la peine de mort sera abolie partout. Le bilan annuel est une occasion pour constater des progrès lents mais réguliers. Les points noirs sont toujours les mêmes : Chine, Iran, Etats-Unis. En moins de dix ans plus de trente pays ont supprimé la peine capitale L’exécution de Troy Davis, le 21 septembre 2011 aux Etats-Unis, fut une défaite pour l’Humanité, mais trente ans après l’abolition de la peine de mort en France, Robert Badinter juge inexorable la marche vers l’abolition universelle, dit-il dans un entretien avec l’AFP http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/monde/20110922.OBS0853/l-execution-de-troy-davis-est-une-defaite-pour-l-humanite-pour-robert-badinter.html . Sur les 193 membres de l’ONU, 139 États l’ont aboli ou exercent un moratoire. « Nous étions le 35 ème en 1981 » a précisé Robert Badinter

L’abolition a fait la preuve que la peine de mort n’était pas un élément dissuasif en termes de lutte contre la criminalité et donc de sécurité. Or, la cause de l’abolitionnisme progresse beaucoup par l’exemple. Un État décide de supprimer la peine de mort, les autres observent les résultats et finissent par  modifier leurs législations. C’est le cas du Togo qui a aboli la peine capitale il y a deux ans. Depuis, des nations telles que le Mali, le Burkina Faso, le Niger envisagent aussi de réformer leur législation. Précisons enfin que l’abolition suit une période moratoire plus ou moins longue. La Corée du Sud vient de fêter ses cinq mille jours sans exécution. La Mongolie a mis en place un moratoire en début d’année.

Pour la majorité des pays aujourd’hui, il s’agit d’un acte inhumain, barbare et dégradant, même si la peine de mort n’est pas formellement condamnée sur le plan international. Mais pour une partie souvent majoritaire de la population, la condamnation à mort relève de la justice, voire de la vengeance : une vie pour une vie. La Charte européenne des droits fondamentaux la condamne formellement. L’on peut  constater que ce sont donc souvent les hommes politiques eux-mêmes qui s’emparent de la question plus que les opinions publiques. Cela vient soit du gouvernement, soit du Parlement. Cela finit par gagner des opinions publiques longtemps réticentes : un exemple, la France Les défenseurs des droits de l’homme comparent souvent le recul de la peine de mort à celui de l’esclavage ou de la torture : un combat de longue haleine poursuivit pendant des décennies voire des siècles.

Il reste difficile de chiffrer les progrès du  mouvement abolitionniste : on ne dispose pas des chiffres de la Chine (NDLR : estimés à plusieurs milliers d’exécutions par an). En Iran, le bilan officiel parle de 250 exécutions annuelles, mais des témoignages évoquent le double. Il y a quand même une diminution du nombre de pays qui procèdent à des exécutions. Aujourd’hui, la plupart des condamnations à mort sont prononcées en Asie ou au Moyen-Orient. Raisonnablement on peut  fonder de grands espoirs après le printemps arabe dans des pays arabes, notamment l’Égypte, la Tunisie et la Libye. Dans ces pays les mouvements démocratiques et de promotion des droits de l’homme se mobilisent pour la suppression de la peine de mort.

La Chine a récemment modifié sa législation autour de la peine de mort. Le sujet fait débat à Pékin , c’est un progrès timide, mais inespéré. La législation chinoise comptait une soixantaine de raisons pouvant conduire à une condamnation à mort. La pression internationale mais aussi nationale a poussé les autorités à supprimer plusieurs crimes passibles de la peine capitale. Il s’agit notamment de délits économiques, les crimes « en col blanc ». La Chine s’est engagée par ailleurs à diminuer le nombre d’exécutions. Cette promesse se heurte à l’absence de chiffres et rend les propos des autorités invérifiables. Une des demandes des organisations de défense des droits de l’homme est d’obtenir une visibilité sur les exécutions.

L’exécution de l’Américain Troy Davis a soulevé une vague d’indignation qui a pu avoir  un effet sur l’opinion publique américaine ? (Cf.; la déclaration de Catherine Ashton, Haute représentante de l’Union européenne  pour les affaires étrangères) http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/cfsp/124645.pdf . La sensibilisation progresse. Il y a eu récemment le débat portant sur les traitements inhumains des condamnés à travers les injections de doses mortelles. Autre argument de poids, le fait que même la justice américaine puisse commettre des erreurs et condamner des innocents. C’était l’argument avancé par le gouverneur de l’Illinois en début d’année pour abolir la peine de mort, devenant le 16e État abolitionniste. Il a rappelé qu’« aucun gouvernement ne peut prendre le risque de condamner un innocent ». Les exécutions baissent d’ailleurs aux États-Unis. Si le Texas ou la Floride ne ralentissent pas la cadence, d’autres comme la Californie s’interrogent notamment sur le coût, jugé exorbitant, de cet acte.

Démocratie et dictature vont souvent de paire  en matière de peine capitale : aux  États-Unis ou au Japon, les condamnations à mort sont réservées aux crimes les plus graves. En Arabie saoudite ou en Iran, les victimes peuvent être exécutées pour adultère ou détention de stupéfiant, voire ailleurs pour homosexualité. la peine de mort peut devenir  une arme pour réprimer et effrayer une population. On l’a vu récemment encore à Bahreïn, où plusieurs figures de l’opposition ont été condamnées à mort.

 

Le mouvement abolitionniste est né au XIX e  siècle. Le XXI e  siècle verra la fin de la peine de mort.  

Site de l’Union européenne  concernant la peine de mort http://www.eeas.europa.eu/human_rights/adp/index_en.htm

EU Guide lines  http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cmsUpload/10015.en08.pdf

L’actualité de la peine de mort dans le monde depuis 1994 http://www.peinedemort.org/peinedemort.php

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

Laisser un commentaire