MISE à JOUR—Future carte d’identité biométrique française : dans la controverse le Parlement a voté, mardi 6 mars, la création d’un fichier recensant les données biométriques de l’ensemble de la population.

Future carte d’identité biométrique française : dans la controverse le Parlement a voté, mardi 6 mars, la création d’un fichier recensant les données biométriques de l’ensemble de la population.Les élus de gauche, qui y voient une atteinte aux libertés individuelles, comptent saisir le Conseil constitutionnel. Un débat mené en toute fin de mandature sans aucune référence aux travaux menés dans le cadre européen et aux différentes prises de position exprimées dans ce cadre. Le contrôleur européen des données s’est largement exprimé à ce sujet, notamment à l’occasion de l’adoption et de la mise en œuvre de SIS II(système d’information Schengen)

 

Comme le souhaitait le gouvernement, le futur document d’identité sera adossé à un fichier centralisé. Et ce par le biais de deux puces électroniques. La première, dite « puce régalienne », contiendra toutes les données biométriques d’un individu (état civil, adresse, taille, couleur des yeux, deux empreintes digitales, etc.). La seconde, facultative, servira de signature électronique sur l’Internet pour des échanges commerciaux et administratifs. Grâce à ce nouveau dispositif, le gouvernement espère « lutter plus efficacement contre l’usurpation d’identité ».

 

La nature du lien entre les données biométriques inscrites sur la carte d’identité et celles centralisées au sein du fichier a fait l’objet d’une très vive polémique entre les parlementaires. L’Assemblée nationale, qui était favorable à un « lien fort », souhaitait que les données recueillies sur le terrain (lors d’enquêtes policières, par exemple) puissent être mises en correspondance avec celles d’un seul individu du fichier. Le tout afin qu’on puisse, en cas d’usurpation d’identité, identifier l’auteur de l’infraction. Les partisans d’un « lien faible », majoritaires au Sénat, préféraient qu’à chaque empreinte corresponde un sous-groupe d’individus, et non une seule identité. De quoi mettre à jour l’usurpation d’identité (13 141 victimes en 2010), sans toutefois connaître son auteur. Les tenants du « lien fort » l’ont finalement emporté.

 

En cas de victoire, le PS envisage une «remise à plat». Mis en garde parla Commissionnationale de l’informatique et des libertés (Cnil), (cf.Nea say) qui précisait dans un avis récent qu’« un fichier est d’autant plus vulnérable qu’il est de grande dimension et qu’il contient des informations très sensibles », les élus UMP ont toutefois consenti à amender le texte. « Le fichier central ne pourra être consulté que sous le contrôle d’un magistrat en charge d’enquêter sur une usurpation d’identité ou d’identifier les victimes d’une catastrophe naturelle ou d’un accident collectif », précise le député UMP Philippe Goujon (Paris). La majorité a, par ailleurs, dû renoncer à ce que le fichier soit interconnecté à d’autres bases de données. « Au final, nous avons abouti à un bon compromis », assure l’élu de la majorité.

 

Un avis qu’est loin de partager l’opposition, contre le « fichage des honnêtes gens ». Le nouveau dispositif risque de porter « des atteintes majeures aux libertés publiques », explique-t-on au PS. « D’abord parce que si l’usage de ce fichier est aujourd’hui circonscrit à la lutte contre l’usurpation d’identité, rien ne nous dit qu’on n’étendra pas demain son utilisation et qu’on ne le consultera pas à tout bout de champ », souligne le député PS Jean-Jacques Urvoas (Finistère), spécialiste des questions de sécurité. Autre argument du socialiste : « Tout fichier finit toujours par être piraté, c’est juste une question de temps. Regardez les données du Stic, ce fichier de police, qui se trouve entre les mains des responsables d’Ikea… Pourquoi le nouveau fichier échapperait-il à la règle ? »

 

En cas de victoire, le PS a fait savoir qu’il envisageait une « remise à plat » du texte et pas son abrogation. Quoi qu’il en soit, les députés PS saisiront  le Conseil constitutionnel sur ce texte.

 

En conclusion on peut estimer que la critique majeure porte  sur le manque de proportionnalité entre le fichier et sa finalité avouée, la lutte contre l’usurpation d’identité. C’est ce qu’avait estimé fin octobre 2011la CNIL(cf. Nea say) : « la proportionnalité de la conservation sous forme centralisée de données biométrique, au regard de l’objectif légitime de lutte contre la fraude documentaire, n’est pas à ce jour démontré ».La CNILs’inquiétait également de la confusion « entre deux catégories de finalités (…) la gestion des procédures administratives de délivrance des titres (…) et un nouvel outil de police judiciaire ». Les garanties en matière d’utilisation des fichiers respectent assez largement celles imposées par le CNIL Certes la loi prévoit qu’aucune interconnexion ne peut être effectuée avec tout autre fichier ou recueil de données nominatives. Mais la loi ne règle pas un problème souvent au cœur des problèmes d’usurpation d’identité : la fiabilité des documents sources fournis par les demandeurs. Rien n’est fait pour empêcher le demandeur de fournir un acte falsifié et les déclarations de perte restent trop peu exigeantes.

 

      -. Fiches de synthèse sur la libre circulation des personnes, asile et immigration http://europa.eu/legislation_summaries/justice_freedom_security/free_movement_of_persons_asylum_immigration/index_fr.htm

 

      -. Résolution de la 33ème Conférence internationale sur la protection des données http://www.edps.europa.eu/EDPSWEB/edps/lang/fr/Cooperation/Intconference

 

      -. Avis du CEPD sur l’utilisation de la biométrie dans les passeports http://www.edps.europa.eu/EDPSWEB/webdav/shared/Documents/EDPS/PressNews/Newsletters/Newsletter_14_FR.pdf

 

      -. Biométrie et interopérabilité des systèmes http://www.edps.europa.eu/EDPSWEB/webdav/site/mySite/shared/Documents/EDPS/PressNews/Press/2010/EDPS-2010-13_Information_management_FR.pdf

 

      -. Article de Eulogos Nea say sur les données biométriques http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=2258&nea=118&lang=fra&lst=0

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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