Droits de la défense : le Conseil constitutionnel français abroge un article permettant de récuser un avocat dans une garde à vue pour terrorisme.

Le Conseil constitutionnel abroge les modalités de désignation des avocats intervenant en garde à vue en matière de terrorisme, l’une des dispositions les plus discutables, une disposition attentatoire aux libertés, la liberté  de choisir son propre avocat.

  Cette mesure, inspirée de la législation espagnole  visait à l’origine des avocats basques suspectés par le parquet d’être des militants. Le  Conseil constitutionnel a rendu  une importante décision en censurant l’article 706-88-2 du code de procédure pénale qui limitait la liberté de choix du gardé à vue en matière de terrorisme en prévoyant une liste d’avocats habilités à intervenir et parmi lesquels un magistrat aurait pu choisir un défenseur à la place de la personne mise en cause. La liberté de choisir son propre avocat « peut, à titre exceptionnel être différé pendant la garde à vue» a tempéré le Conseil constitutionnel, mais « il incombe au législateur de définir les conditions et les modalités selon lesquelles, une telle atteinte aux conditions d’exercice des droits de la défense peut être mise en œuvre ». Cependant il faut être attentif au fait que le Conseil constitutionnel n’a pas considéré que le libre choix faisait partie des libertés fondamentales et qu’il était possible de restreindre ce droit s’il était mieux encadré par la loi.

 Cette décision nous donne une fois de plus l’occasion de signaler une  avancée du Conseil constitutionnel qui renforce l’État de droit au même titre que la Cour européenne des droits de l’homme. Cependant que se poursuivent dans l’ignorance et l’indifférence française les débats européens (notamment au Parlement européen) sur cette même thématique suite aux propositions de la Commission (cf. Nea say).

 Extraits de l’éditorial de Christian Charrière-Bournazel, Président du Conseil national des barreaux, Ancien bâtonnier de Paris | 17 février 2012

« Le Conseil constitutionnel a d’abord affirmé que, en principe, la liberté, pour une personne soupçonnée, de choisir son avocat « peut, à titre exceptionnel, être différée pendant la durée de sa garde à vue afin de ne pas compromettre la recherche des auteurs de crimes et délits en matière de terrorisme ou de garantir la sécurité des personnes ». Cependant, il a tempéré ce principe en indiquant que la loi devait alors définir « les conditions et les modalités selon lesquelles une telle atteinte aux conditions d’exercice des droits de la défense peut être mise en œuvre » (cons. 7).

Appliquant ce raisonnement aux dispositions de l’article 706-88-2 du code de procédure pénale, le juge constitutionnel a relevé qu’elles n’offraient pas de garanties suffisantes et violaient les droits de la défense dès lors que le pouvoir donné au juge de priver la personne gardée à vue du libre choix de son avocat n’était pas suffisamment encadré. En effet, le Conseil constitutionnel relève que la loi ne prévoit pas l’obligation pour le juge de motiver sa décision et qu’elle ne définit pas les circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction ni les raisons permettant d’imposer une telle restriction aux droits de la défense. L’article 706-88-2 du code de procédure pénale est donc abrogé à compter de la publication de la décision n° 2011-223 QPC au Journal officiel. Cette décision est applicable à toutes les gardes à vue mises en œuvre à compter de la date de sa publication. »

 

      -. Article de Nea say consacré au rapport de la députée européenne Birgit Sippel et aux propositions de la Commission européenne sur les droits de la défenses http://europe-liberte-securite-justice.org/2011/11/26/droits-de-la-defense-de-nouveaux-progres-en-perspective-un-sujet-qui-fait-lunanimite-la-garantie-des-droits-a-linformation-dans-le-cadre-des-affaires-penales/

      -. Dossier de Nea say sur la garde à vue http://www.google.be/#hl=fr&rlz=1R2ADFA_frBE462&sclient=psy-ab&q=garde%20%C3%A0%20vue%20site%3Aeu-logos.org&rlz=1R2ADFA_frBE462&oq=&aq=&aqi=&aql=&gs_sm=&gs_upl=&gs_l=&pbx=1&bav=on.2,or.r_gc.r_pw.r_qf.,cf.osb&fp=63783d055b73a261&biw=1280&bih=547&pf=p&pdl=3000

      -.  Position du Conseil national des barreaux qui a formé un recours contre le décret relatif à la désignation des avocats pour intervenir en garde à vue en matière de terrorisme http://cnb.avocat.fr/Projets-de-textes-relatifs-a-l-aide-a-l-intervention-de-l-avocat-au-cours-de-la-garde-a-vue-des-propositions_a1061.html http://cnb.avocat.fr/Le-CNB-forme-un-recours-contre-le-decret-relatif-a-la-designation-des-avocats-pour-intervenir-en-garde-a-vue-en-matiere_a1176.html

      -. Commentaires du CNB et accès aux références citées http://cnb.avocat.fr/Le-Conseil-constitutionnel-abroge-les-modalites-de-designation-des-avocats-intervenant-en-garde-a-vue-en-matiere-de_a1210.html

      -. Dossier spécial du CNB consacrée à la garde à vue http://cnb.avocat.fr/Dossier-special-Garde-a-vue_r88.html

      -. Texte de la décision du Conseil constitutionnel http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2012/2011-223-qpc/decision-n-2011-223-qpc-du-17-fevrier-2012.104837.html

      -. Extraits de l’éditorial de Christian Charrière-Bournazel président du Conseil national des barreaux (CNB) http://cnb.avocat.fr/Le-Conseil-constitutionnel-abroge-les-modalites-de-designation-des-avocats-intervenant-en-garde-a-vue-en-matiere-de_a1210.html

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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