Le 5 novembre dernier, l’enceinte du Comité Economique et Social Européen accueillait la conférence organisée par ECAS (« European Citizen Action Service ») sous le thème de « Building the EU citizen pillar ». A la veille de l’année 2013 – placée sous le signe de la citoyenneté européenne – les intervenants invités par ECAS sont revenus sur des thématiques citoyennes importantes comme les ICE, la maison européenne des citoyens, ou le programme de 2013 en lui-même.
C’est face à un auditoire comble que les différents membres du panel se sont succédés, apportant une pierre supplémentaire à l’édifice citoyen européen. Non loin de cette métaphore empruntée à la construction, le premier sujet sur la table de la conférence fut le projet de la maison des citoyens. Dans le concret, donc.
Il s’agirait en effet d’ouvrir dans la capitale européenne une enceinte dédiée à 100% à la citoyenneté européenne, une sorte d’euro-temple pour le citoyen. Les bâtiments ayant déjà été désignés, c’est au cœur du quartier européen (Chaussée de Wavre, ainsi que l’Orangerie, certes plus excentrée) que devrait naître ce nouvel office.
Plus concrètement, ces trois bâtiments s’organiserait sur la règle des 3 « C » (de l’anglais : Citizens’ rights, Civil society and Citizen Participation). Cette maison citoyenne serait dédiée d’une part aux organisations de la société civile et d’une autres aux citoyens et associations (avec un bureau d’aide, un centre de documentation, …) et enfin, le bâtiment de l’Orangerie qui serait utilisé pour y tenir des meetings et autres activités destinées au grand public. Le projet de la maison des citoyens européens est au final destiné à être le centre même d’un lobby citoyen, encore inexistant à l’heure d’aujourd’hui.
La maison des citoyens européens aurait par la suite des antennes – dans un premier temps virtuelles – dans tous les Etats membres (et dans toutes les langues officielles de l’Union) – parallèlement à la mise en place d’un portail « EU Right’s clinic » à partir du 1er janvier 2013. Assya Kavrakova – directrice chez ECAS en charge du projet – a reconnu l’ambition du projet et appelle à un travail en synergie avec les structures nationales afin qu’on puisse espérer voir la maison des citoyens européens ouvrir ses portes d’ici la fin 2015.
Autre sujet à l’ordre du jour de la conférence d’ECAS était la question des ICE (Initiative Citoyenne Européenne). Les représentants de trois d’entre elles sont intervenus, à savoir : Let Me Vote (conférer le droit de vote au citoyen européen à tous les niveaux d’élection dans son pays de résidence) ; Water is a Human Right (assurer l’accès à l’eau potable en tant que droit fondamental) et aussi Fraternité 2020 (améliorer les échanges au sein de l’Union, comme le programme Erasmus ou le service volontaire européen).
Force est de constater que, malgré leur importance, les ICE restent difficile à faire aboutir. Le portail virtuel mis en place par la Commission européenne pour récolter les signatures est loin d’être une efficacité sans faille. Pour appuyer ce propos, Xavier Dutoit de « Water is a Human Right » a fait devant l’assemblée la démonstration d’une tentative de signature en ligne et ce n’est pas une sinécure (et c’est sans mentionner le coût qu’impliquerait la gestion de son propre réseau de signatures en ligne). Les ICE ont donc la vie dure, il faut les faire connaître au travers toute l’Union.
Bernd Biervert, chef de cabinet du Commissaire européen en charge des relations inter-institutionnelles et de l’administration (Maros Sefcovic), a tout de même souligné le long chemin qui a déjà mené à la naissance des ICE (seulement deux ans après l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne) et il est donc logique que des développements ultérieurs devront encore être apportés afin que celles-ci deviennent totalement efficientes.
C’est pourquoi les différents mouvements à l’origine des ICE doivent se soutenir mutuellement et former une sorte de « Communauté des ICE », ce à quoi a appelé Christophe Leclerq, fondateur d’EurActiv : « Les ICE sont les propositions qui font le lien entre les initiatives de la société civile et les politiques initiées des institutions et partis politiques ». Faire connaître les nouveaux acteurs/outils que sont les ICE auprès des citoyens, c’est au final participer au renforcement de l’intégration européenne, comme l’a souligné Judith Valles de la Fondation Ferrer i Guàrdia.
Dans un troisième temps, c’est de l’année 2013 en elle-même dont il fut question. Placée sous le thème de la citoyenneté européenne, elle est présentée par le rapport de l’eurodéputée Antigoni Papadopoulou (S&D – CY), intervenante du dernier panel de la conférence d’ECAS. 20 ans après l’inscription dans les Traités à Maastricht de la citoyenneté européenne, 2013 semble en effet une occasion idéale pour faire le point sur la question. Selon la rapporteuse du Parlement Européen, il faut tout de fois souligner une faiblesse majeure quant à la préparation de cette année 2013 : la Commission ne prévoit qu’un budget à hauteur de maximum 2 millions d’euros (le budget le plus petit pour une année européenne). Concrètement, que faire si l’on veut qu’il y ait un réel impact auprès du citoyen européen, et pas seulement dans la bulle de Bruxelles ? Face à cette interrogation budgétaire, Sophie Beernaerts de la Direction Générale Communication de la Commission a annoncé que d’autres programmes de financement viendraient compléter le budget initialement prévu. A quelle hauteur maintenant ? Pas de réponse.
Pour promouvoir la citoyenneté européenne et la faire intégrer, 2013 est une occasion idéale. Certes, le sentiment citoyen ne sera pas dans le cœur de tous les européens au 31 décembre 2013. Néanmoins, comme l’a souligné Diogo Pinto (European Year of Citizens Alliance), il est nécessaire d’utiliser 2013 pour « sensibiliser, poser les vraies questions, renforcer les droits, pour que les citoyens se rendent compte que 2013 leur appartient ». L’année européenne des citoyens doit donc être l’occasion pour servir d’étincelle !
Dans ses remarques de conclusion, Luca Jahier (Comité Economique et Social Européen) a souligné le fait qu’à l’heure d’aujourd’hui, c’est bien plus la crise qui est au centre des préoccupations du citoyen. Il est donc nécessaire de donner un message clair en direction d’une citoyenneté européenne consciente pour une population toujours plus large. Mr Jahier rappelait d’ailleurs l’importance du « triangle démocratique » que constitue les articles 10, 11 et 12 du Traité sur l’Union Européenne : en effet, ceux-ci reviennent sur la démocratie représentative, les ICE et la participation des parlements nationaux. Dynamiser cette dimension est essentiel pour promouvoir la citoyenneté européenne. Pourquoi ne pas proposer la tenue d’états généraux de l’Union Européenne en vue des élections du Parlement en 2014 ?
Une maison des citoyens au cœur de l’Europe en lien avec l’ensemble de l’Union, une communauté des ICE, une année 2013 réellement au service des citoyens avec des actions effectives : toute une série d’instruments qu’il faut concrètement mettre à profit si l’on veut faire participer à la construction du pilier citoyen européen.
François Balate
Pour en savoir plus :
– ECAS – European Citizen Action Service – site officiel (EN)
Le site de l’Alliance pour l’année européenne des citoyens (European Year of Citizens Alliance – EYCA) est accessible à l’adresse: ey2013-alliance.eu/
Le Manifeste pour une citoyenneté européenne active adopté par les organisations et réseaux membres de l’Alliance est disponible à cette adresse en plusieurs langues.