Les ministres des Affaires étrangères de l’UE ont souligné lors de leur réunion du 18 février quelles étaient leurs priorités, la première étant la gravité de la situation des droits de l’homme en Syrie. Au cours de cette 22ème session, qui se déroulera du 25 février au 22 mars, l’UE insistera sur la nécessité que les auteurs des graves violations et abus rendent compte de leurs actes et sur l’obligation d’empêcher que ces actes restent impunis. L’UE plaide aussi pour que des mesures soient prises concernant le Mali, soulignant à cet égard leurs graves préoccupations.
Les ministres des Affaires étrangères souhaitent qu’un accent particulier soit mis sur la situation des droits de l’homme en Corée du Nord, pour laquelle elle proposera avec le Japon un mécanisme d’enquête indépendant pour appuyer le rapporteur spécial. Ils ajoutent que l’UE soutiendra « activement » la prorogation du mandat du rapporteur spécial sur l’Iran et souhaitent que le CDH continue à travailler sur le Belarus, le Sri Lanka, le Congo, l’Erythrée, le Soudan et le Sud Soudan.
Le Conseil précise qu’une « des tâches essentielles du CDH » sera de renouveler le mandat du rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction. Le droit des enfants et des femmes, des personnes handicapées, des droits de l’homme sur Internet (notamment la protection des journalistes et des blogueurs), la discrimination selon le genre ou l’orientation sexuelle, le soutien aux défenseurs des droits de l’homme, la liberté d’association et de réunion font, tous, aussi partie des priorités de l’Union européenne.
Enfin les ministres invitent tous les Etats membres des Nations-Unies à coopérer de manière effective à l’examen périodique universel (EPU) sur la situation des droits de l’Homme.
Rappelons que le Conseil de l’UE a adopté le 25 juin 2012 « le cadre stratégique et plan d’action de l’UE en matière des droits de l’homme et démocratie » (cf. infra « pour en savoir plus)
Qu’est-ce que le Conseil de droits de l’Homme des Nations-Unies ? Un raccourci historique.
Son histoire est récente (naissance en 2006) mais agitée et faisant l’objet de polémiques incessantes et ardentes. Il succède à la Commission des droits de l’Homme totalement décrédibilisée en raison notamment du mode de désignation de ses membres.
Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies est depuis 2006 l’organe intergouvernemental principal des Nations unies sur toutes les questions relatives aux droits de l’homme. Sa création a été impulsée par le secrétaire général de l’ONU d’alors, Kofi Annan, qui , dans les années 1997-2005, avait estimé que la commission des droits de l’homme avait terni l’image des Nations-Unies. Il avait proposé de redorer son image en le faisant élire directement par l’Assemblée générale, en élargissant son domaine de compétence, en le hissant au rang d’institution et non plus de simple organe fonctionnel du Conseil économique et social. Sa création est décidée après le Sommet mondial des Nations unies de septembre 2005 et la résolution 60/251 de l’Assemblée générale du 15 mars 2006 fait du Conseil un organe subsidiaire de l’Assemblée générale, avec la première élection organisée le 9 mai 2006, une durée du mandat initial des membres déterminée par tirage au sort, tout en respectant une répartition géographique équitable. La première session ordinaire du Conseil s’ouvre le 19 juin 2006 et une deuxième du 19 septembre au 6 octobre 2006. L’actuelle session est la XXIIème. Un des principaux changements a consisté en la mise en place d’un mécanisme d’examen périodique universel (EPU) puisque concernant tous les pays au regard des droits de l’homme.
En 2007 est créé le Comité consultatif du Conseil des droits de l’homme composé de 18 experts siégeant à titre individuel, faisant fonction de groupe de réflexion attaché au Conseil, et de rapporteurs spéciaux des Nations Unies chargés des droits économiques, sociaux et culturels (logement convenable, droit à l’alimentation , droits civils et politiques, droit au développement, droits des peuples et de groupes et individus particuliers. Sous la présidence de George W. Bush, les États-Unis sont opposés à la création d’un Conseil sous cette forme. Ils ont par le passé vivement critiqué l’ancienne Commission, qu’ils jugeaient avoir perdu toute crédibilité suite à la présence de plusieurs pays violant les Droits de l’Homme, les attaques ont visé notamment la Libye de Khadafi qui eu à exercer la présidence de la Commission des droits suscitant les critiques que l’on peut imaginer. Les garanties apportés par la création de ce nouveau Conseil ne les satisfaisant pas, ils ne se sont pas présentés comme candidats à la première élection. Mais l’entrée en fonction de Barack Obama en 2009 change la politique du pays. Dans une lettre du 22 avril 2009, la représentante permanente des États-Unis auprès de l’ONU, Susan E. Rice, annonce l’intention de son pays de se porter candidat à un siège au Conseil des droits de l’homme et le 12 mai les États-Unis sont élus membres du Conseil pour un mandat allant de 2009 à 2012.
Le 26 mars 2012, Israël a décidé de rompre tout contact avec le Conseil des droits de l’homme, jugeant que ce dernier est biaisé et se concentre de manière disproportionnée sur la situation des territoires occupés. Cette annonce fait suite à la décision du Conseil de démarrer une mission d’enquête internationale indépendante sur l’impact des colonies israéliennes dans les Territoires palestiniens occupés. En conséquence, Israël risque donc d’être le premier pays à ne pas se soumettre à l’Examen Périodique Universel.
Tous les ingrédients sont donc réunis pour que les polémiques se poursuivent notamment à l’occasion des examens périodiques universels.
En effet, mis à part les rapports trisannuels dédiés au développement des politiques de droits humains que les États membres doivent soumettre au Secrétaire général depuis 1956, le mécanisme d’EPU du Conseil des droits de l’homme constitue une grande nouveauté dans le domaine. Il marque l’abandon du processus de la sélection qui a été critiqué par plusieurs États et Organisations non gouvernementales (ONG). Enfin, le mécanisme illustre et conforte le caractère universel des droits humains. Ce mécanisme d’examen concerne tous les pays à tour de rôle à partir de février 2008. Au cours de sessions spécifiques du Conseil, chaque pays fait l’objet d’un débat de trois heures, qui permettra de formuler un projet de recommandations adressées à l’État examiné ou sur un projet de résolution. La procédure est détaillée et minutieuse. Les ONG peuvent assister à cet examen mais sans prendre la parole. Lors de l’adoption du rapport en séance plénière du Conseil, c’est-à-dire lorsque les recommandations finales sont adoptées, elles disposent de 20 minutes pour prendre la parole. Une étude de fin 2012 montre qu’entre deux EPU 40% des recommandations ont déclenché une action de l’État.
Les controverses et polémiques sont multiples : beaucoup tournent autour d’Israël. Dés sa création en 2006 Kofi Annan déclarait regretter que le Conseil ne porte pas la même attention aux violations commises dans certains États que celles commises en Israël. En 2007, le Secrétaire Général de l’ONU Ban Ki-moon déclarait être « déçu par la décision du Conseil de choisir seulement un dossier régional spécifique, le conflit israélo-palestinien, malgré l’étendue et la portée des allégations de violations de droits de l’homme dans le monde entier ». C’est déjà le retour des comportements qui ont miné la précédente Commission des droits de l’homme. Les Etats-Unis continuent à critiquer les modalités d’adhésions au Conseil. Certains font observer que le Conseil n’a condamné qu’un petit nombre de pays, la République démocratique du Congo, la Somalie, la Corée du Nord ou encore Israël, estimant que ce dernier « est resté la cible d’un nombre excessif de résolutions la condamnant : 19 sur 31 depuis la première session du Conseil, les qualifiant « d’unilatérales ». Autre point de frictions sévères, à l’ONU, un mouvement s’efforce depuis plusieurs années de promouvoir l’inscription de la diffamation des religions comme une nouvelle forme de racisme. Ces tentatives, promues notamment par l’Organisation de la coopération islamique (OCI), est également régulièrement critiqué au niveau international.
Les lecteurs de Nea Say qui ont suivie le déroulement des conférences dites de Durban I et Durban II ne seront pas surpris par la tournure que prennent les débats au sein du Conseil des droits de l’homme (CDH) des Nations-Unies. Le déroulement des sessions du Conseil font habituellement l’objet d’un examen attentif de la part du Parlement européen. Ce sera aussi la première fois qu’un Conseil des Droits de l’Homme se déroule depuis la désignation d’un Haut représentant de l’UE pour les droits de l’Homme, Stavros Lambrinidis .
Pour en savoir plus
-. Communiqué du Conseil des droits de l’homme http://www.ohchr.org/FR/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=13014&LangID=F
-. Liste des documents qui seront examinés lors de la 22ème session du Conseil des droits de l’Homme http://www.ohchr.org/EN/HRBodies/HRC/RegularSessions/Session22/Pages/ListReports.aspx
-. Communiqué de presse du Conseil des Affaires étrangères(FR) http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/FR/foraff/135605.pdf (EN) http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/EN/foraff/135544.pdf
-. Cadre stratégique et plan d’action de l’UE en matière de droits de l’homme et démocratie (FR) http://eeas.europa.eu/delegations/haiti/documents/eu_haiti/cadre_strategique_plan_action_union.pdf
-. Communiqué du Parlement européen concernant l’adoption du cadre stratégique et du plan d’action de l’UE en matière de droits de l’homme et démocratie (FR) http://www.europarl.europa.eu/the-president/en-fr/press/press_release_speeches/press_release/2012/2012-june/press_release-2012-june-12.html
-. Dossier des conférences Durban I et Durban II de Nea say http://www.eu-logos.org/eu-logos-nea-recherche.php?q=durban&Submit=%3E