Les institutions européennes (Commission européennes, présidence de l’Union européenne, Conseil de l’Europe)sont sommées par les forces politique de faire leur devoir. Le Conseil de l’Europe somme Athènes de faire face au « danger » d’Aube dorée. Une fois de plus Mme Reding menace la Hongrie, le compte à rebours est lancé. Plusieurs Etats membres veulent sortir de l’impuissance institutionnelle, coincée entre le recours à l’article 7 du Traité, véritable bombe atomique ou le recours aux procédures d’infraction , longues et inopérantes. Ils demandent de nouveaux mécanismes comme l’avait suggéré l’Irlande au début de sa présidence.
Inquiet de la situation en Grèce, le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Nils Muiznieks, a livré un rapport très politique, mardi 16 avril, sur l’augmentation du racisme et des crimes racistes, en pointant la faiblesse des réponses apportées à la montée du parti néonazi Aube dorée. « Les Grecs doivent comprendre qu’il ne s’agit pas d’un parti normal et qu’il faut prendre des mesures avant qu’il ne devienne plus dangereux », explique M. Muiznieks dans un entretien au Monde.
Pour lui, le gouvernement doit affronter la question de l’interdiction pure et simple du parti néonazi Aube dorée, qui a obtenu près de 7 % des voix aux élections de juin 2012 et compte 18 députés. « Il faut procéder par étapes. D’abord, sur le plan individuel, en poursuivant et en condamnant avec une plus grande vigueur les crimes racistes et l’appel à la haine raciale, venant de membres d’Aube dorée. Ensuite, on peut envisager des actions au niveau collectif. Il y a des moyens légaux pour interdire un tel parti. La Constitution grecque prévoit qu’un parti doit « servir le libre fonctionnement d’un système démocratique », ce qui n’est pas le cas d’Aube dorée. »
Dans sa réponse au rapport du commissaire, le gouvernement rappelle que la Constitution, après la chute de la dictature en 1974, était destinée « à éviter les interventions législatives et judiciaires dans le fonctionnement libre des partis politiques. La Grèce peut et doit utiliser les traités internationaux qu’elle a ratifiés. La Cour européenne des droits de l’homme permet des sanctions proportionnées et l’interdiction si nécessaire de parti comme l’Aube dorée. Le commissaire aux droits de l’homme s’étonne : comment le parlement grec peut-il admettre que des élus de l’Aube dorée viennent siéger au Parlement avec des armes ? Il faut agir maintenant, demain ce sera trop difficile. L’Aube dorée s’attaque aux fondements de la démocratie. La justice est lente et clémente à l’égard des actes de racisme. Le commissaire aux droits de l’homme regrette une rhétorique stigmatisant les immigrés. Elle est utilisée par la police souvent en connivence avec l’Aube Dorée, mais le premier ministre, Antonis Samaras en fait usage aussi par des propos maladroits ;;Quant au ministre de l’ordre public, Nikos Dendias, il vient de déclarer : « jamais depuis l’invasion des Doriens, il y a 4000 ans, le pays n’a été victime d’une telle invasion . C’est une bombe placée dans les fondations de la société et de l’Etat ».
Le commissaire aux droits de l’homme tire la sonnette d’alarme : « j’ai rencontré plusieurs personnes qui m’ont expliqué que ces phénomènes de violence raciale sont marginaux et que les grecs ne sont pas racistes et avaient le sens de l’accueil. Mais les statistiques montrent qu’il y a une montée des agressions et je leur répondais : si vous n’êtes pas racistes, prouvez-le en combattant efficacement les crimes racistes et la haine raciale ».
Mais la Grèce n’est pas la seule atteinte par cette érosion démocratique : Hannes Swoboda, le président du Groupe de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen, a demandé (16 avril) à la Commission d’enquêter sur un scandale d’écoutes téléphoniques en Bulgarie. Cela à quelques jours du vote pour les élections parlementaires du 16 mai. Ce « Bulgarian Watergate » n’est pas nouveau, c’est un phénomène quasi permanent : faut-il rappeler qu’en février 2011, le Parlement européen a dû déjà en débattre. Le parti Gerb de Boris Borissov (démissionnaire depuis le 20 février) est clairement mis en cause. Cet pratique de l’espionnage téléphonique n’a cessé de grandir sous son gouvernement. Le procureur général a apporté une grande quantité d’informations toutes accablantes :par exemple la commissaire bulgare, Gorgieva aurait elle aussi fait l’onjet d’écoutes téléphoniques. Stanishev ancien premier ministre et actuellement président du Parti socialiste européen a accusé l’ancien ministre de l’intérieur et vice-premier ministre d’avoir organisé sous le gouvernement de Borissov d’avoir organisé tout un dispositif à une échelle proprement monstrueuse, faits confirmés par le procureur général. La Commission européenne a été informée par le procureur général mais n’a pas à ce jour exprimé un commentaire quelconque. Notons que sur ce point la Commission a été discrète dans son rapport dans le cadre du Mécanisme de Vérification et de Coopération.
A son tour Guy Verhofstadt, President du groupe ALDE ,commentant l’enquête du Bureau du Procureur général bulgare sur les allégations d’écoutes illégales de dizaines de dirigeants de l’opposition en Bulgarie, (qu’il a qualifié de « fait préoccupant pour l’Europe ») a fait la déclaration suivante :
« La sanction d’écoutes illégales d’opposants politiques en Bulgarie par les autorités étatiques sape la démocratie et l’équité du processus électoral. Le mécanisme de surveillance de l’Union européenne couvre le respect des questions concernant l’Etat de droit et c’est pourquoi le scandale en cours devrait être sérieusement analysé par la Commission européenne. A moins d’un mois avant les élections en Bulgarie, les citoyens ont besoin d’être rassurés sur le fait que leurs droits fondamentaux sont protégés. »
Les chefs des délégations bulgares au sein de l’ALDE, Antonyia Parvanova (SMN) et Filiz Hyusmenova (MRF) ont ajouté : « La situation actuelle est le résultat du parti GERB abusant systématiquement de son autorité. Le scandale est la preuve d’un processus extrêmement dangereux de politisation au sein du ministère de l’Intérieur au cours des quatre dernières années. Ce processus renvoie la Bulgarie à la période sombre du régime totalitaire et nous éloigne des valeurs européennes, l’Etat de droit et la démocratie. »
Quant à Stanichev il a demandé à Mme Reding, vice présidente de la Commission européenne et en charge de la Justice, de rompre le silence.
Tout cela constitue un fait préoccupant pour l’Europe ( et non pour tel ou tel pays pris nommément) vient de souligner Guy Verhofstadt. Il a raison car c’est elle, l’Europe, l’instance d’appel et de recours ultime comme nous venons de le voir et pas l’Etat membre défaillant et cela au moment où tout ce qui est fait par l’Europe, ou en son nom, est contesté,( le bon comme le moins bon, le nécessaire indispensable comme le facultatif) car perçu comme non légitime, par les populations elles mêmes Plus que préoccupant, c’est inquiétant.
Henri Pierre Legros
Pour en savoir plus :
-. Communiqué de presse du groupe S&D du Parlement européen sur l’érosion démocratique en Hongrie et Bulgarie http://www.socialistsanddemocrats.eu/gpes/public/detail.htm?id=138109§ion=NER&category=NEWS&request_locale=EN
-. Communiqué de presse du groupe ALDE (FR) http://www.alde.eu/fr/presse/communiques-presse-et-nouvelles/communiques-de-presse/article/wiretapping-scandal-in-bulgaria-is-a-matter-of-european-concern-41002/
-. Greece must curb hate crime and combat impunity http://hub.coe.int/en/web/coe-portal/press/newsroom?p_p_id=newsroom&_newsroom_articleId=1408927&_newsroom_groupId=10226&_newsroom_tabs=newsroom-topnews&pager.offset=0
-. Rapport après la visite en Grèce du Commissaire au droit de l’homme du 28 janvier au 1er février 2013 https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CommDH(2013)6&Language=lanEnglish&Ver=original&BackColorInternet=B9BDEE&BackColorIntranet=FFCD4F&BackColorLogged=FFC679