Mais que sont-elles devenues ? On les cherche encore désespérément. En deux ans, seuls 3 projets sur 40 ont passé les filtres redoutables institutionnels. Le dernier en date (« One of us ») aurait dû par le sujet abordé (ni plus, ni moins que le droit ou l’interdiction de l’avortement pour certains, avec à l’arrière plan la situation dans les pays en voie de développement) aurait dû retenir l’attention des médias. Or il n’en a rien été !
On a complètement oublié que les citoyens pouvaient, non pas user du pouvoir de légiférer, mais fixer leurs propres priorités en soumettant leurs propositions de loi grâce à cette nouveauté du traité de Lisbonne. C’est un progrès considérable à l’heure, celle des élections européennes, où unanimement chacun se plaint de la distance qui sépare le citoyen d’institutions inaudibles et sourdes aux intérêts et préoccupations véritables et immédiates des citoyens.
Au bout du compte, ce bel outil, personne ne le connaît réellement : la société civile si souvent invoquée et appelée à la rescousse, n’en a rien fait !Contrairement à ce qu’avaient avancées les oiseaux de mauvaise augure, la Commission européenne n’ a pas été submergée par une avalanche ingérable de demandes fantaisistes, abusives, vexatoires, voire insultantes. Certes de tels cas ne furent pas absents(abolir le Parlement européen, traduire en espéranto l’hymne à la joie), mais tout cela est de bonne guerre et ne discrédite pas les ICE.
L’ICE, trop compliquée, trop contraignante pour des individus isolés ou quasiment, sans réseaux et sans ressources, incapables de rivaliser avec les bureaucraties des partis politiques ou l’expertise et l’influence des lobby ? L’argument n’est pas convaincant ou bien faudrait-il se résigner à ce que démocratie et Europe sont incompatibles ? Non bien sûr
Des améliorations peuvent et doivent être apportées : plus de simplicité, moins d’obstacles, certains peuvent être levés maintenant que l’expérience a apporté la preuve que le système n’a pas entraîné des dérives littéralement catastrophiques. La société civile doit aussi se retrousser les manches et consentir à un effort d’une réelle ampleur. La démocratie a un prix. Participation aux élections européennes et initiative citoyenne, c’est le même combat. Un combat sans relâche, de tous les instants, sans délais ou attente dilatoire.
Il ne faut décourager personne : à cet égard la récente décision de la Commission concernant « ONE OF US » représente un mauvais signal, envoyé à un mauvais moment. Il contribue à affaiblir en pratique l’instrument, et s’il faisait jurisprudence, il limiterait le champ d’intervention et réduirait amplement les occasions de débats ordonnés et démocratiques.. En effet si on va au fond des choses, cette décision négative est prononcée en raison du fait que le débat est déjà engagé au sein des institutions. Or la démocratie a tout intérêt à voir se développer un débat selon deux voies différentes : la voie institutionnelle classique et celle, plus spontanée, de l’ICE
Henri-Pierre Legros
– Dossier ICE de Nea say EN
– Article de Euractiv EN