Lorsqu’on en vient à la protection des travailleurs, dans le désert social de l’UE, il convient cependant de ne pas oublier que l’Union européenne dispose d’une directive protégeant les femmes enceintes, accouchées ou allaitantes. Cette directive de 1992 aménage les conditions de travail des femmes enceintes et leur assure des garanties concernant leur emploi.
En ce qui concerne les conditions de travail, le travail de nuit doit être à tout prix évité avant et après l’accouchement. La travailleuse dispose de dispenses de travail pour des examens médicaux liés à sa condition. La directive établit également une durée minimale de congés maternité fixée à quatorze semaines. Pendant cette durée, une rémunération minimale doit être assurée. Si la femme travaille dans un environnement où des produits chimiques, biologiques ou des procédés industriels qui peuvent mettre sa santé en péril, leur employeur doit se résoudre à l’adoption de mesures provisoires concernant son emploi le temps de la grossesse.
En ce qui concerne les garanties concernant leur emploi, celles-ci portent sur la prévention des licenciements contradictoires.
En 2008, la Commission a proposé une nouvelle directive, qui vise à modifier certains points de la directive de 1992, en assurant plus de protection aux femmes actives enceintes. Cette modification aurait porté sur le congé maternité, allongé de 4 semaines et sur la reconnaissance d’un congé paternité de deux semaines. La protection contre les licenciements discriminatoires aurait été également renforcée.
Aurait ? En effet, depuis mi-juin, cette directive semble être sur la sellette. La proposition, datant de 2008, acceptée par le Parlement en 2010, reste bloquée au niveau Conseil de l’Union européenne depuis 2014. Dans une Communication du 18 juin 2014, la Commission a estimé que ce blocage pouvait être réglé par un retrait des propositions législatives qui ne font pas l’unanimité. En ce sens, la Commission ne fait donc que d’user de son pouvoir d’initiative et ce retrait s’inscrirait dans une simplification de la législation européenne.
Mais d’un point de vue symbolique, un tel retrait constitue un point négatif pour l’Union européenne. D’une part, il montre une absence de courage politique face à un texte luttant contre la discrimination. D’autre part, l’Union européenne apparaît allant en contre-sens de son engagement pour le droit des femmes : selon la Secrétaire générale du Lobby européen des femmes, Joanna Maycock, « la décision de retirer cette directive est scandaleuse car des femmes enceintes (ou potentiellement) sont prises en otage, mais les hommes aussi, puisque la directive inclut des dispositions sur le congés de paternité, car il n’y a pas de directive pour ce type de congé. » Ces propos, adressés à Jean-Claude Juncker, président pressenti de la Commission européenne, laisse envisager un début de mandat difficile pour l’homme politique luxembourgeois.
Margot Molenda
Pour en savoir plus
– Directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail. (FR)(EN)
– Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 3 octobre 2008 portant modification de la directive 92/85/CEE du Conseil concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (FR/EN)
– Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et social européen et au comité des régions, Programme pour une réglementation affûtée et performante: situation actuelle et perspectives, 18/06/2014. (FR) (EN)
– EU-Logos, « Congé de maternité : c’est l’impasse entre le Conseil et le Parlement européen. Qu’il le veuille ou non, la balle reste dans le camp du Parlement, 20/11/2011 » (FR)