Lors de la session de la Commission Libertés, Justice and Affaires intérieures (LIBE) du Parlement européen qui s’est tenue le 22 et 23 juillet, une partie de la session a été fermée au public. Comment expliquer une telle pratique par une institution qui ne cesse de réclamer plus de transparence ?
Lors de sa dernière session, la Commission LIBE du Parlement s’est entretenue à huis clos sur deux sujets : l’accord Safe Harbour entre l’UE et les États-Unis d’une part et l’accord sur la protection des données dans les échanges de données à caractère personnel à des fins répressives entre l’UE et les États-Unis d’autre part.
Quelle réglementation pour la tenue de sessions en huis clos ?
Le Règlement intérieur du Parlement européen rappelle à l’article 115 que les séances des commissions parlementaires sont normalement publiques, cependant certains points de la réunion, établis dans l’ordre du jour, peuvent être « interdits au public ».
Par ailleurs, pour la PESC (Politique étrangère et de sécurité commune ), à la demande de la Commission, une commission peut déclarer le huis clos. Cette procédure est décrite à l’article 112 du Règlement intérieur. Cependant, même si ces points sont discutés en huis clos, la commission parlementaire peut rendre accessibles au public les documents et le procès verbal de la réunion.
Une telle décision est-elle justifiable pour les deux sujets concernés ?
L’accord Safe Harbour (« Sphère de sécurité » en français) est issue de la Directive 95/46 du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et de principes de protection des données personnelles publiés par le Département du Commerce américain. Cet accord était signé en 2000
Si des entreprises décident d’appliquer ces principes, elles peuvent alors transférer des données personnelles de l’UE vers les États-Unis. Depuis le scandale NSA, le Parlement européen a logiquement demandé de nouvelles négociations. Ses négociations butent sur la question de l’accès aux données par les autorités américaines, pour motif de sécurité nationale.
Lors de la Commission LIBE, ce sujet a été débattu dans le plus grand des secrets alors qu’il ne s’agissait ici que d’un compte-rendu de la réunion ministérielle UE-Etats-Unis qui s’était tenue fin juin.
L’accord-cadre concernant la protection des données dans les échanges de données à caractère personnel à des fins répressives a également été débattu à huit clos. Cet accord-cadre pose simplement des principes pour la protection des données mais ne remplace pas les accords sectoriels déjà existants. Là encore la session de la commission parlementaire ne faisait qu’un compte-rendu de la réunion ministérielle.
Pourquoi tant de mystères ?
La députée néerlandaise Sophie In’t Veld, membre du groupe ALDE, est intervenue avant l’ouverture de ces sujets : elle juge le huis clos non nécessaire et aimerait entendre les justifications de la Commission pour une telle confidentialité.
Depuis le début des négociations UE-USA, celles-ci se font dans une opacité réelle à la fois pour le Parlement européen et pour les citoyens. On peut espérer obtenir des informations dans le procès-verbal de la session, mais celui-ci est publié généralement tardivement. Ce n’est donc pas encore gagner.
Par Margot Molenda
Pour en savoir plus
– Règlement du Parlement européen, 8è législature, juillet 2014 [FR] [EN]
-Dossier CNIL, Le Safe Harbour [FR]
-Directive 95/46 du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données [FR] [EN]
– Dossier FAQ de la Commission, Safe Harbour [FR] [EN]
– Sylvie Pérou pour Réseau universitaire européen, Le futur accord Etats-Unis – Union européenne relatif aux données à caractère personnel dans le cadre de la lutte contre le terrorisme : avancées décisives et soft power européen, 28/06/2014 [FR]
– Parlement Européen, Document de travail sur le futur accord international entre l’Union européenne et les États-Unis d’Amérique relatif à la protection des données à caractère personnel lors de leur transfert et de leur traitement aux fins de prévenir les infractions pénales, dont les actes terroristes, d’enquêter en la matière, deles détecter ou de les poursuivre dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale rédigé par Jan-Philipp Albrecht, 14/07/2014 [FR] [EN]