Google vient de lancer la campagne « Take Action » sur le droit à l’oubli. Pour cette occasion Google se rendra dans 7 capitales européennes ( Madrid, Rome, Paris, Bruxelles…) où elle tiendra des conférences sur le droit à l’oubli et son équilibre possible avec le droit à l’information.
L’obligation de mettre en balance les intérêts privés et l’intérêt supérieur d’information du public:
Suite à l’arrêt rendu par la Cour de Justice de l’Union européenne rendu le 13 mai 2014, il a été affirmé que la directive 95/46/CE relative à la protection des données à caractère personnel prévoit les « droits d’accès, de rectification, de suppression et d’opposition à l’encontre du moteur de recherche même si les contenu ne sont pas supprimés par l’auteur ». Le droit à l’oubli numérique permettrait donc à toute personne de demander à Google que les liens faisant référence à une donnée personnelle puissent être supprimés.
Afin de répondre à cette nouvelle jurisprudence Google à mis en ligne un formulaire permettant aux citoyens européens de demander la suppression de résultats de recherche comportant leurs données personnelles et qu’ils ne souhaitent pas voir apparaître. Suite à cela plus de 91 000 demandes ont été introduites devant Google et plus de 50% de ces demandes ont été exécutées. Cependant les conditions posées par la Cour imposent à Google la mise en balance entre les intérêts privés et l’intérêt supérieur de l’information du public. Google a critiqué l’arrêt de la Cour sur la complexité de mettre en balance ces intérêts, et sa compétence à être le seul juge de cette appréciation pour un nombre grandissant de demandes. Considérant que cette obligation constitue un « nouveau défi de taille » pour Google, elle a décidé de lancer un débat en Europe afin de « définir les principes directifs » qui lui permettront de se prononcer sur chacun des cas.
La campagne « Take Action » : Google lance une réflexion sur l’équilibre entre le droit à l’oubli et l’information du public :
L’objectif affiché par Google est de créer un débat autour de la question de comment équilibrer le droit à l’oubli d’une personne et le droit de l’information du public. Plusieurs actions sont menées pour diffuser l’information autour de cette question. Plusieurs conférences auront lieux dans 7 capitales européennes. Celles ci réuniront à la fois le Comité consultatif constitué pour cette occasion par Google ainsi que plusieurs experts nationaux. En outre une consultation en ligne a été lancée, afin de connaître l’opinion des citoyens sur la décision de la CJUE.
Pour le moment le débat a eu lieu à Madrid et à Rome. Le débat est complexe, et de nombreux points sont soulevés.
Un des premiers points évoqués à Rome par Guido Scorza, expert en Technologie et Droit d’internet, est le risque de modifier le cours de l’histoire, par la suppression de liens renvoyant à des contenus sur internet. Selon lui l’ère digitale confronte plusieurs principes ; la liberté d’expression des citoyens et leur droit à l’information mais aussi la protection des données à caractère personnel. Parfois la balance des deux est difficile à mettre en place. Pour lui le droit à l’oubli offrirait la possibilité de modifier le cours de l’histoire. La suppression de liens conduirait à désinformer le public. Conformément à l’arrêt de la CJUE » Google doit trancher selon « la nature de l’information en question et sa sensibilité pour la vie privée de la personne concernée ainsi que l’intérêt du public à recevoir cette information ».
Dans cette série de conférences Google se positionne clairement comme le leader mondial des moteurs de recherche, attentif à la protection de la vie privée et au droit à l’oubli mais rappelle l’équilibre nécessaire que doivent avoir ces principes face à la liberté d’expression et au droit à l’information. D’autre part Google souligne que tous les moteurs de recherche doivent être soumis à ces obligations.
Ce débat ouvert par Google serait-il une manière de se positionner en Europe contre l’enquête menée par la Commission ? Le lancement de cette campagne sera t’il bien reçu par les institutions européennes toujours plus sceptiques vis à vis du géant internet ?
Il faut rappeler que Martine Reichert, commissaire à la Justice considère l’arrêt de la CJUE comme « crucial », et s’oppose à toute détérioration de la notion de droit à l’oubli. Elle a ainsi affirmée en aout 2014 que « gérer les données personnelles de citoyens génère d’énormes bénéfices économiques. Cela apporte aussi des responsabilités. Ce sont les deux faces d’une même pièce». D’autre part elle a rappelé aux États membres la nécessité d’adopter un nouveau cadre de protection des données avant 2015.
Que ce soit pour son abus de position dominante ou concernant la mise en application du droit à l’oubli, Google est plus que jamais mis à l’indexe. Il faudra donc rester attentif sur le déroulement de ce débat ainsi que sur sa clôture qui aura lieu à Bruxelles ce 4 novembre.
Guibbert Marie Anne
En savoir plus:
– Communiqué de Presse n°70/14- CJUE- 13/05/2014 –
Langue FR –
http://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2014-05/cp140070fr.pdf
– Arrêt Google Spain SL / Agencia de Protección de Datos (AEPD), Mario Costeja Gonzáles – CJUE – 13/05/2014 –Langue FR –
– Comité Consultatif de Google – https://www.google.com/advisorycouncil/?utm_medium=email&utm_source=google
-Affaire Google : sur l’arrêt de la CJUE du 13 mai 2014, les données à caractère personnel et le droit à l’oubli sur Internet – Antoine Chéron – 09/09/2014 – Langue FR – http://www.journaldunet.com/ebusiness/expert/58383/affaire-google—sur-l-arret-de-la-cjue-du-13-mai-2014–les-donnees-a-caractere-personnel-et-le-droit-a-l-oubli-sur-internet.shtml
-. Dossier Google de Nea say http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=3222&nea=148&lang=fra&arch=0&term=0