Quelques jours après de nouvelles libérations, une semaine après la publication du Sénat américain sur les pratiques de la CIA, (cf. autre article) cette nouvelle libération de détenus de Guantanamo marque-t-elle un nouveau tournant ? Shawali Khan, Khi Ali Gul, Abdul Ghani et Mohammed Zahir ont été libérés de la prison située à Cuba après un « examen minutieux » de leurs dossiers, notamment l’aspect sécuritaire, explique le ministère américain de la Défense dans un communiqué.
Après le transfèrement des quatre hommes, il reste désormais 132 hommes dans le centre de détention. Ces libérations, et celles de six autres détenus envoyés en Uruguay au début du mois, permettent à l’administration américaine de se rapprocher du but énoncé par le président Barack Obama dès 2009: fermer la prison de Guantanamo, symbole de la très controversée « Guerre contre le terrorisme » lancée par George W. Bush juste après les attentats du 11-Septembre. Ce qui est peut-être nouveau c’est que ces rapatriements reflètent la détermination du département de la Défense à fermer le centre de détention de Guantanamo de façon responsable », a expliqué Paul Lewis, chargé de la fermeture de la prison au Pentagone.
Les quatre Afghans ont tous été arrêtés en Afghanistan entre 2002 et 2003. C’est dire qu’ils passèrent plus de 12 ans en prison sans être jugés. Ils étaient soupçonnés d’entretenir des liens étroits avec les talibans ou Al-Qaïda. Mais leurs avocats ont toujours clamé que les preuves avancées par l’accusation étaient bien trop minces pour permettre de les condamner. L’un des avocats d’Abdul Ghani, appréhendé à Kandahar (sud de l’Afghanistan) en décembre 2002, argue ainsi que son client n’est qu’un simple paysan qui se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment lors de son arrestation. Et les avocats de Shawali Khan, remis aux forces américaines par des seigneurs de guerre afghans en novembre 2002, se plaignaient de ce que les preuves « non fondées » à l’encontre de leur client, provenaient d’une seule source. A Kaboul, le Haut conseil pour la paix, une instance gouvernementale afghane chargée de favoriser les négociations avec les insurgés, a salué le rapatriement des quatre hommes qui devraient, selon lui, revoir leurs familles « très prochainement ». Le Haut conseil exige aussi dans un communiqué « que tous les prisonniers encore détenus soient transférés le plus vite possible ».
Rappelons, une fois de plus, que lors de son arrivée au pouvoir en 2009, Barack Obama avait fait de la fermeture de Guantanamo une priorité, mais six ans plus tard, ses efforts sont entravés par le Congrès américain et la difficulté à trouver un pays d’accueil aux détenus. Des 132 prisonniers qui restent à Guantanamo, 63 sont considérés comme « libérables » par l’administration américaine. Mais de ce groupe, 54 Yéménites ne peuvent être renvoyés chez eux en raison de la violence et du chaos qui règnent au Yémen. Enfin, une quinzaine de détenus dits « de grande valeur » sont enfermés dans le camp 7, parmi lesquels les cinq accusés du 11-Septembre, dont Khaled Cheikh Mohammed (l’instigateur et le coordinateur du 11 septembre, et celui de l’attentat contre l’USS Cole, renvoyés devant la justice militaire d’exception où ils risquent la peine de mort.
Henri-Pierre Legros
Pour en savoir plus :
-. Dossier Guantanamo de Nea say http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=3334&nea=152&lang=fra&arch=0&term=0Times:
-. New York Times: the Guantanamo Docket http://projects.nytimes.com/Guantanamo
-. Wikileaks: Guantanamo Files https://wikileaks.org/gitmo/