Un ressortissant d’un pays tiers en situation irrégulière, simplement soupçonné d’avoir commis une infraction pénale, pourrait être considéré, sous réserve d’un examen de sa situation individuelle, comme constituant « un danger pour l’ordre public » au sens de la directive sur le retour des clandestins (directive2008/115/CE) et par conséquent être expulsé immédiatement, ou dans les sept jours selon les cas, sans qu’il soit nécessaire d’attendre sa condamnation définitive.
Telle est la conclusion suggérée le 12 février §affaire C-554/13) par l’avocat général Eleanor Sharpston, pour répondre sur ce point au Conseil d’Etat néerlandais ; Ce dernier demande par ailleurs à la Cour de préciser les circonstances à prendre en compte pour déterminer la « notion de danger pour l’ordre public » (gravité et nature de l’infraction,temps écoulé et intention de l’intéressé de quitter l’UE) et d’indiquer si les autorité doivent en tenir compte pour décider si accorder un délai de départ inférieur à sept jours ou ordonner une expulsion immédiate.
Dans ses conclusions Madame Sharpston indique tout d’abord que pour déterminer si et dans quelle mesure un ressortissant de pays tiers en situation irrégulière constitue un danger pour l’ordre public, les autorités compétentes doivent examiner sa situation individuelle et non se fonder sur des considérations générales (ainsi d’avoir commis une infraction pénale ou d’être en séjour irrégulier ce qui ne constitue pas nécessairement un danger pour l’ordre public).
Cependant pour le cas où la personne se serait rendue coupable d’une infraction pénale, les autorités n’auront pas besoin d’attendre qu’une condamnation soit prononcée pour organiser le départ de la personne dans un délai inférieur à sept jours, comme le prévoit la directive. La simple suspicion peut suffire, si l’examen de son cas révèle qu’elle peut constituer un danger pour l’ordre public, étant entendu que cette suspicion doit être fondée sur des éléments sérieux et non sur de simples allégations.
Quant aux critères à prendre en compte pour définir la « notion de danger pour l’ordre public et déterminer si la personne doit être expulsée immédiatement ou peut bénéficier d’un délai allant jusqu’à sept jours pour quitter le territoire sur une base volontaire , Mme Sharpston indique : la gravité et la nature de l’infraction, le temps écoulé depuis que celle-ci a été commise et le degré d’implication de la personne, son intention ou non de quitter volontairement le territoire de l’Union ainsi que les risques de fuite, de récidive ou de voir la personne commettre une infraction encore plus grave.
Enfin la décision d’accorder ou non un délai pour le départ doit être prise en respectant le principe de proportionnalité. Ainsi un Etat ne peut refuser automatiquement ce délai pour la seule raison qu’un danger à l’ordre public a été identifié, mais doit procéder à un examen au cas par cas.
L’arrêt qui interviendra dans les prochains mois, pourrait permettre d’introduire une certaine harmonisation dans un domaine où bien souvent la disparité entre les législations et l’absence de critères précis ouvrent la porte à un certain arbitraire dans les pratiques administratives.
Pour en savoir plus :
Affaire C-554/13 (FR) http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?docid=145605&mode=req&pageIndex=1&dir=&occ=first&part=1&text=&doclang=EN&cid=545855 (EN) http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?docid=145605&mode=req&pageIndex=1&dir=&occ=first&part=1&text=&doclang=EN&cid=545855
-. Directive 2008//115/CE (FR) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2008:348:0098:0107:FR:PDF (EN) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2008:348:0098:0107:EN:PDF