Un pape en colère : l’encyclique Laudato si. Sauvegarder la maison commune, un impératif !

La pause estivale est propice pour ces retours en arrière, sur des évènements passés mais qui marque et cette marque est d’autant plus profonde qu’elle surgit dans moment d’apparente oisiveté. Notons que c’est cette période qu’a choisie Alain Juppé pour nous dire ce qu’il faut retenir d’essentiel de cette encyclique. Un témoignage utile que tous les responsables politiques devraient faire , chacun à son tour.

Le pape François a donné pour titre à sa dernière encyclique les premiers mots d’un cantique de Saint François d’Assise : «  Loué sois-tu mon Seigneur ». Le message est clair : c’est une ode à « notre sœur, notre mère la terre, qui nous soutient et nous gouverne, et produit divers fruits avec les fleurs colorées et l’herbe. » C’est aussi un cri « en raison des dégâts que nous causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. » Le sous-titre est explicite : « Sur la sauvegarde de la maison commune. ». Dans un style simple, pédagogique, bien informé mais sans abus pour ne pas détourné l’attention sur l’essentiel.

C’est aussi un beau texte, simple, clair, pédagogique et démonstratif, un texte que l’on prend plaisir à lire. Ce texte nous entraîne et nous invite à nous mettre en route. Mais le pape est en colère : sa première partie , intitulée : « Ce qui se passe dans notre maison », est un constat violent qui pourrait servir de discours d’introduction à la prochaine conférence des Nations Unies sur le climat (COP 21).

Un pape François en colère. Les lecteurs de Nea say de Eulogos ne seront pas surpris eux qui ont pu lire le compte rendu détaillé de la visite faite à l’automne dernier par François à Strasbourg auprès des parlementaires européens, notamment . Beaucoup avait donc déjà été dit. Un pape déterminé Une fois de plus ! Seul un changement radical de style de vie, soit l’adoption d’un modèle plus sobre et plus solidaire, est susceptible de sauver la maison commune. Une nouvelle idée du progrès. Qui n’aime pas la création , n’est pas un bon chrétien

Pour l’inauguration de son pontificat, François s’est présenté sur le balcon de Saint-Pierre, sitôt après son élection, en simple soutane blanche, comme étant l’évêque de Rome, la ville éternelle, puis il a réservé son premier voyage aux migrants de l’île italienne de Lampedusa. Sa fidélité des premiers instants, il l’a définitivement prouvée, confirmée dans la première encyclique écrite entièrement de sa main, «Sois loué», une charge sans concession contre l’ordre actuel du monde.

François se montre révolutionnaire, d’abord, par son refus du fatalisme. Son encyclique ne se contente pas de dénoncer les principaux maux dont souffre l’humanité: la destruction inconsidérée , irresponsable de l’environnement et la misère de milliards d’êtres humains. Tout est présenté comme le résultat de choix tangibles et non de la fatalité et donc comme des réalités réversibles.

Le pape est révolutionnaire, ensuite, par sa volonté de désigner les causes profondes de ces fléaux. Quitte à se créer des opposants déterminés, des opposants beaucoup plus puissants que lui, il dénonce chapitre après chapitre la rapacité des pays riches et des grandes entreprises qui exploitent sans compter les ressources naturelles, la lâcheté des dirigeants politiques qui les laissent faire et le cynisme d’une culture dominante du déchet et de l’immédiateté. Une nouvelle fois, François s’emporte contre cette culture du déchet, montrée du doigt aux parlementaires européens.

Révolutionnaire, François l’est enfin par les solutions qu’il propose. Il ne croit pas aux «formules magiques» qui garantiraient une croissance économique sans fin, tout en ménageant des ressources naturelles limitées. A ses yeux, seul un changement radical de style de vie, l’adoption d’un modèle plus sobre et plus solidaire, est susceptible de porter des fruits.

Révolutionnaire? Communiste! ont même dénoncé les plus farouches opposants et ils sont légion, dès avant la publication officielle de l’encyclique. François n’est pas un scientifique, un ingénieur, un manager, il ne sait donc pas ce qui est bon pour l’environnement. Le pape n’est pas un économiste, il ne sait donc pas ce qui est bon pour l’économie, ont déclaré d’ autres.

Mais c’est faire au pape un mauvais procès. Les atteintes à l’environnement comme la misère persistante d’êtres humains posent des défis moraux avant de représenter des problèmes techniques. Quelle vie souhaitons-nous mener? Comment entendons-nous gérer les limites de notre planète? Et, surtout, quelle responsabilité nous reconnaissons-nous les uns envers les autres? Se poser ces questions est essentiel. Et François est dans son rôle de nous y encourager. Toute personne de bonne volonté ne peut que lui en être reconnaissante.

Commentaires de Alain Juppé

Un autre son de cloche avec Alain Juppé ? Pas vraiment ! Son souci est moins de commenter, d’explique, mais c’est : que doit on retenir de tout cela ou plus exactement qu’est-ce que lui,Alain Juppé retient de tout cela.

Bien sûr , le Pape donne une profondeur religieuse à sa réflexion et un fondement théologique à son plaidoyer écologique. Il faut préserver la nature qui nous environne parce que c’est une création de Dieu .Mais « dire CRÉATION , c’est signifier plus que NATURE parce qu’il y a un rapport avec un projet de l’amour de Dieu dans lequel chaque créature a une valeur et une signification. »

«Le Pape affiche avec force l’obsession qui traverse toute l’encyclique : la dénonciation des inégalités et de la pauvreté dont il fait une composante essentielle de son « écologie intégrale » . Il ajoute : « Il est vrai que nous devons nous préoccuper que d’autres êtres vivants ne soient pas traités de manière irresponsable . Mais les énormes inégalités qui existent entre nous devraient nous exaspérer particulièrement, parce que nous continuons à tolérer que les uns se considèrent plus dignes que les autres. »

D’où son extrême sévérité contre ce qu’il appelle les « mythes de la modernité » : l’individualisme , le progrès indéfini , la concurrence , le consumérisme, le marché sans règles … Ou encore : « L’économie assume tout le développement technologique en fonction du profit , sans prêter attention à d’éventuelles conséquences négatives pour l’être humain . Les finances étouffent l’économie réelle. »Ce qui ne le conduit pas, contrairement à ce que j’ai entendu dans la bouche de certains lecteurs , à rejeter en bloc la science et la technique bien au contraire, je le cite : « La science et la religion qui proposent des approches différentes de la réalité peuvent entrer dans un dialogue intense et fécond pour toutes les deux. » Quant à la technologie, « elle a porté remède à d’innombrables maux qui nuisaient à l’être humain et le limitaient. » Mais l’homme doit la maîtriser et la mettre à son service , sinon » ce qui est en jeu dans la technique , ce n’est ni l’utilité ni le bien-être mais la domination ».

Alain Juppé de poursuivre : « J’ai été sensible à l’éloge qu’il fait de valeurs fondamentales que croyants et non-croyants peuvent partager : la famille , « lieu de la formation intégrale » ; le travail , « chemin de maturation , de développement humain et de réalisation personnelle » ; ou encore la sobriété qui n’est pas une vie de « basse intensité mais tout le contraire ». Pour le Pape François, « on peut vivre intensément avec peu surtout quand on est capable d’apprécier d’autres plaisirs et qu’on trouve satisfaction dans les rencontres fraternelles , dans le service , dans le déploiement de ses charismes , dans la musique et l’art , dans le contact avec la nature , dans la prière . » Il donne cette définition du bonheur : « le bonheur requiert de savoir limiter certains besoins qui nous abrutissent , en nous rendant ainsi disponibles aux multiples possibilités qu’offre la vie ». Il recommande de « prêter attention à la beauté et (à) l’aimer , (ce qui ) nous aide à sortir du pragmatisme utilitariste ».

Il y a encore beaucoup à puiser dans « Laudato si’ », qu’on soit chrétien ou non, insiste Alain Juppé pour qui est un être humain c’est quiconque qui se considère et agit comme «  administrateur responsable » de notre maison commune.

 

Pour en savoir plus

Texte intégral de la lettre encyclique Laudato si’ du saint Père François sur la sauvegarde de la maison commune http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/encyclicals/documents/papa-francesco_20150524_enciclica-laudato-si.html

Commentaires de Alain Juppé sur son blog Twitter http://www.al1jup.com/laudato-si/

Le pape François au Parlement européen http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=3392&nea=157&lang=eng&lst=0

 

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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